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La crise pousse les TO dans le rouge

Après deux ans de crise, et alors que la reprise pointe – timidement – son nez, les défaillances se multiplient chez les TO. Cas particuliers, écrémage naturel ou vrai problème structurel ? Le secteur en profite pour continuer sa consolidation.

À écouter les commentaires de rentrée, les professionnels sont plutôt optimistes avec des ventes d’arrière-saison et surtout des prises de commandes pour l’hiver reparties à un rythme soutenu. Est-on pour autant sorti d’affaire ? Les défaillances en série qui viennent de frapper plusieurs tour-opérateurs en vue (Locatour-Tourmonde, Inexco, Nosylis après OK Tourisme et Royal Tours cet été, Marsans au printemps) quand d’autres, comme Voyageurs Associés, sont contraints à la procédure de sauvegarde, semblent plutôt indiquer que l’heure de vérité, et des comptes, a sonné. Après deux années éprouvantes, beaucoup d’entreprises sont fragilisées et n’ont d’autre alternative que de jeter l’éponge. « 2009 a été très compliquée et nous avons fortement ressenti les effets de la crise », témoigne Frédéric Savoyen, président de Nosylis qui s’est déclaré en cessation de paiement le 6 octobre. « Malgré la reprise en 2010 et une situation financière correcte en avril et fin août, nous n’avons pu redresser la barre. Rumeurs […], forte récession, manque de rentabilité, ont eu raison du magnifique projet de reprise qui se présentait à nous. » Les investisseurs pressentis ont en effet, in extremis, décliné l’offre de reprise. Un scénario proche de celui d’Inexco (liquidé le 5 octobre) et de Locatour-Tourmonde dont la liquidation devrait être prononcée, sans surprise, cette semaine. « 2010 est un exercice difficile en termes de résultats », confirme René-Marc Chikli, président de l’association de tour-opérateur Ceto. « En 2009, contrairement aux pronostics, les entreprises ont montré une bonne capacité de résistance mais la tension sur les prix depuis un an est terrible. »

« LA TRÉSORERIE, NERF DE LA GUERRE »

L’hiver 2009-2010 a été mauvais. La pression tarifaire ne s’est pas desserrée depuis, avec un consommateur qui dicte sa loi et des opérateurs très agressifs, à l’instar de Thomas Cook. Bref, « celles qui sont entrées fragiles dans la crise sont aujourd’hui à bout de souffle », commente le président du Ceto. Nosylis, que son positionnement très haut de gamme rendait encore plus sensible (la perte d’un seul client en 2010 lui a coûté 1,5 ME de chiffre d’affaires) concède que son besoin de recapitalisation remontait à plus de 14 mois. Inexco a été surpris par la récession un an après le rachat de CGTT et alors qu’il s’était engagé dans de lourds investissements. Au 30 octobre 2008, le bilan faisait déjà apparaître une perte de 1,8 ME pour 53,7 ME de chiffre d’affaires. De son côté, le Tourisme Moderne et ses marques Locatour-Snotour-Tourmonde accumulait depuis des années des déficits faute d’avoir su, ou pu, anticiper la relève de son président fondateur, Étienne Le Guillou, décédé le 10 septembre dernier à l’âge de 90 ans. Quant à Marsans, lancé dans une folle course en avant aux détriments de ses marges, il a explosé en vol plantant clients et fournisseurs. « Aucun profil type ne se dégage réellement des derniers dépôts de bilan », estime pourtant Jean-Pierre Mas, coprésident de AS Voyages. Même s’il reconnaît que « c’est une période charnière pour le tour-operating contraint de choisir entre deux modèles économiques qui exigent tous les deux des finances solides : soit il est en mesure de prendre des risques industriels maîtrisés, ce que n’a pas su faire Marsans, soit il est expert et hyperspécialisé sur une destination comme Asia », poursuit-il. Pour Richard Vainopoulos, président de TourCom, les TO subissent aussi la concurrence d’Internet dans la construction de leurs produits. « Ils subissent plus Internet que les agences, car nous pouvons développer nos outils alors que les TO manquent de flexibilité pour gérer leurs stocks et leurs tarifs, ils peuvent moins répondre aux demandes de dernière minute de nos agences. » Le niveau de maturité financière des TO semble avoir progressé et les systèmes de garde-fous ont peut-être joué leur rôle. Les dernières défaillances, y compris celle de Royal Tours en juillet, ont en effet occasionné peu de casse. « On a eu affaire à des chefs d’entreprise responsables qui ont su s’arrêter à temps contrairement à Marsans », remarque Raoul Nabet, président de l’APS qui ne chiffre « qu’à 300 000 E » le coût des trois derniers sinistres pour l’association de solidarité. « On a une certaine visibilité sur les entreprises à risques », reconnaît René-Marc Chikli. « Sachant que la trésorerie est le nerf de la guerre et la grande question existentielle des TO. » En avoir ou pas. « Ceux à qui elle fait défaut aujourd’hui, dans un contexte de résultats dégradés, ne s’en remettent pas ». Mais, d’après le président du Ceto, la reprise est en vue, ce qui devrait redonner de l’oxygène et éviter de nouvelles défaillances. Même sérénité du côté de l’APS qui dresse un bilan optimiste des adhésions, 36 rien que pour le mois de septembre. « Nous aurons un solde positif en 2010 contrairement à 2009 où nous avions terminé avec 7 adhérents en moins », témoigne Raoul Nabet. Ce qui prouve que la crise n’est pas ressentie de la même façon par tous et qu’il y a « une reprise de dynamisme du secteur ». Reste que les TO continuent de se plaindre du poids de la pression exercée par la distribution, certains parlant même de racket. Les distributeurs continueraient-ils de faire monter les enchères alors que les producteurs sont dans une phase critique ? « Ce sont surtout des fautes de gestion des TO ! », s’insurge Richard Vainopoulos.

DES CENTRALES COFFRES-FORTS

« Nous les réglons en moyenne 15 à 30 jours après le départ des clients tandis que les tour-opérateurs paient leurs fournisseurs, hôteliers et réceptifs, à 60 jours au retour des clients », ajoute-t-il. « Sans oublier que quand des dossiers sont annulés, ils prennent souvent 90 % de frais d’annulation. » Les centrales de règlement des réseaux font désormais office de coffres-forts, conservant les paiements des clients des agences jusqu’à exécution de la prestation par le tour-opérateur. « Cela permet de ne pas faire courir de risque au réseau et à nos agences, notre système fonctionne parfaitement », se félicite Jean-Pierre Mas. « Notre rôle n’est pas de provoquer des faillites en déréférençant des TO mais de mesurer le risque », se défend-il. Cette surveillance de la santé financière des fournisseurs s’exerce de manière continue et Richard Vainopoulos, qui avait placé « Nosylis sous surveillance depuis un an », regrette que les TO, lorsqu’ils sont sortis du référencement, continuent de solliciter et de travailler avec les agences en leur faisant prendre des risques. Se considérant comme des forteresses assiégées, les réseaux comprennent pourtant bien la nécessité de compter dans leurs rangs des partenaires TO forts et solides, pourvoyeurs de volumes. Mais pas à n’importe quelle condition. Jean-Pierre Mas croit « beaucoup à la création de relations de qualité avec des producteurs qui ne soient pas nos concurrents et qui nous permettent d’assurer des volumes de ventes, mais ils sont très peu à pouvoir le faire… ».

« Aucun profil type ne se dégage réellement des derniers dépôts de bilan. »

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