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Gaël de La Porte du Theil, Interface : « Il faut arrêter de proposer le tourisme du passé »

En février 2020, juste avant que le Covid ne vienne tout bouleverser dans l’industrie, Interface soufflait ses 20 bougies. Malgré la pandémie, l’agence n’a pas encore achevé sa croissance. Gaël de la Porte du Theil revient pour L’Echo sur la création d’International Tourism Group, alliance stratégique pour  faire face aux défis du tourisme post-Covid.

S’adapter : c’est le maître-mot pour les acteurs du tourisme depuis dix-neuf mois, et pour beaucoup, ce changement de rythme forcé aura au moins offert l’opportunité de prendre le temps de poser à plat certaines réflexions stratégiques. 

C’est notamment le cas de l’agence de communication et de marketing Interface, qui a annoncé à la rentrée un rapprochement avec deux agences étrangères. « Nous avions des accords de bon voisinage avec ces agences, nous faisions des opérations ensemble, mais nous n’avions pas de partenariat économique, explique Gaël de la Porte du Theil, le directeur général d’Interface. L’objectif, c’était de trouver un partenaire anglais et un partenaire allemand, et il faut avouer qu’à quelque chose malheur est bon, puisque le Covid a été un élément déclenchant dans le processus de recherche que je menais. » Dans ce contexte inédit de nouveaux besoins sont apparus, ou se sont intensifiés. « Avec le Covid, nous nous sommes tous rendu compte assez rapidement qu’on avait besoin d’investir dans des outils technologiques, d’avoir de meilleures relations, d’échanger des bonnes pratiques », explique Gaël de la Porte du Theil. Et de changer d’échelle. 

Asseoir son implantation en Europe

Au terme de plusieurs mois de discussions, le groupe a donc signé avec l’agence Black Diamond au Royaume-Uni et Global Communications Experts en Allemagne pour devenir International Tourism Group (ITG). La société est enregistrée en France et détenue à 100% par les trois agences partenaires, Gaël de La Porte du Theil en est le président. « On rentre dans un processus d’intégration avec les avantages que ça procure, en essayant de ne pas en avoir les inconvénients, souligne Gaël de la Porte du Theil. Si nous allons standardiser certains de nos process comme par exemple les reportings à nos clients, nous savons aussi que chacun de nos marchés sont différents. Il faut être intégré, et en même temps respecter chacun des pays dans ses particularités. » Incluant également les agences qu’Interface détenait déjà en Italie, en Espagne, au Portugal et au Benelux, la nouvelle entité est donc implantée dans sept pays au total et indique générer des facturations annuelles nettes de plus de 10 millions d’euros. Son développement n’est sans doute pas fini. Mais l’objectif, au moins dans un premier temps, est d’asseoir son implantation en Europe, qui représente 50% des voyages internationaux et 35 % des dépenses touristiques mondiales. Avant de peut-être regarder ailleurs dans le monde.

Avec cette opération, ITG entend aussi se donner les moyens de coller aux évolutions d’un secteur dont les transformations ont été accélérées par la crise sanitaire. En s’appuyant notamment sur la data et de nouveaux outils. Certaines acquisitions ont déjà pu être réalisées en ce sens. « Nous avons acheté en commun Travellyze, société qui a pour objectif de faire des études de marché très rapide, quand on en a besoin, pour les clients, explique Gaël de la Porte du Theil. C’est une acquisition que nous n’aurions pas pu faire avant. Mais à six, c’est devenu possible. Nous avons aussi un autre outil qui permet de faire de la formation, ajoute-t-il. Une autre « grosse opération » qui doit apporter de la compétence au groupe est aussi dans les tuyaux. Mais motus pour le moment.

« On doit faire évoluer les produits »

Pour Interface, cette opération est donc un tournant qui doit permettre d’accompagner la relance d’un secteur qui a vécu une crise d’une violence sans précédent. « La pandémie a indirectement généré une prise de conscience de la nécessité d’un tourisme responsable, observe Gaël de la Porte du Theil. Quand je dis responsable, ça ne veut pas dire uniquement écologique. C’est plus large que ça. Le tourisme doit maintenant être réfléchi, c’est une industrie où on ne peut pas faire n’importe quoi, il faut que les gens soient formés, il faut arrêter de proposer le tourisme du passé », estime-t-il. « Il faut faire en sorte que les échanges entre les pays émetteurs et les pays récepteurs ne se limitent pas au fait d’aller dans une destination, de prendre un moyen de transport, un hôtel, de voir les trois trucs qui se trouvent dans tel ou tel guide. C’est sympathique, mais on voit bien que beaucoup des personnes que nous côtoyons ont maintenant des envies différentes et notamment les jeunes, qui veulent vivre des expériences. (…) Les pays et ceux qui, comme nous sont des conseils dans ce domaine, doivent faire évoluer les produits, élargir le champ de ce qui peut être intéressant pour un voyageur.”

Chacun ses enjeux,  chacun son rythme : toutes les destinations n’auront sans doute pas la même maturité sur le sujet. Mais pour le patron d’Interface, le mouvement est enclenché dans le secteur. « Globalement, je pense que c’est un phénomène inéluctable car certains prennent conscience qu’ils sont en train de scier la branche sur laquelle ils sont assis et que leurs pratiques sont contre-productives, ne serait-ce que par rapport à leur intérêt économique. »

« Je suis assez optimiste. Je pense que le tourisme va continuer à progresser, peut-être plus intelligemment. Le tourisme était une activité artisanale il y a encore quelques années, ça devient très industriel, il faut maintenant avoir cette conscience. En quelques décennies nous sommes passés de 800 millions à 1,4 milliard de voyageurs, c’est une croissance phénoménale, et quand on a ce genre de croissance, il y a toujours des excès. (…) Toutes les personnes qui viennent travailler dans ce domaine d’activité doivent comprendre qu’elles ont une mission qui n’est pas exclusivement de vendre, mais également de faire en sorte que tout se passe dans les meilleures conditions. » 

Et les voyageurs, sont-ils prêts à changer de comportement ? « Il y a eu un sevrage malheureusement et quand on a été sevré de quelque chose, on a une envie un peu forcenée, un peu immature par certains côtés de rattraper le temps perdu. Mais c’est aussi aux professionnels de savoir tempérer et surtout de ne pas repartir sur des sentiers qui n’étaient pas les bons. il y a une prise de conscience, je le ressens vraiment en parlant avec tous mes interlocuteurs un peu partout dans le monde, dans le travail que l’on fait pour la relance d’un certain nombre de pays. On se rend très bien compte que ça devient important. Il faut repartir, en profitant de ce moment pour essayer de jouer un peu plus sur la responsabilité, sur le tourisme responsable. Le terme est le bon. »

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