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Fabrice Dariot (BDV) : « Le digital est plus inquiétant que l’aérien en émissions de CO2 »

L’aérien est régulièrement pointé du doigt. Fabrice Dariot, président de Bourse des Vols, reconnaît son impact. Mais pour lui, les inquiétudes sont ailleurs, notamment du côté du numérique et de ses data centers.

L’Echo touristique : En raison des faibles capacités, les prix ont flambé sur quelques destinations lors des vacances de la Toussaint. Peut-on s’attendre au même phénomène pour les fêtes de fin d’année ?

Fabrice Dariot : Nous le savons tous, les moyennes sont des menteuses. En moyen-courrier, les offres sont considérables. Mais sur certaines dates et des destinations populaires, le yield management joue. Si tout le monde veut passer Noël à New York, les prix vont flamber. En général, les augmentations ont trois origines : tout le monde veut les mêmes dates, les aéroports sont tentés d’augmenter les redevances aéroportuaires, et le prix du kérosène augmente. Ces trois phénomènes inflationnistes peuvent cependant être contrebalancés par des phénomènes déflationnistes, par la surabondance de l’offre. La compagnie préfère avoir un siège bon marché plutôt qu’un siège vide.

Je ne dis pas qu’une taxe kérosène est souhaitable, mais elle serait dans l’ère du temps.

Faut-il craindre une surcharge carburant ?

Fabrice Dariot : Faut-il le craindre, l’espérer ou l’observer ? Nous avons constaté une hausse du prix du carburant. A un moment, l’exception du kérosène qui n’est pas taxé ne perdurera pas. Je ne dis pas qu’une taxe kérosène est souhaitable, mais elle serait dans l’ère du temps. A quoi servirait-elle ? Elle pourrait devenir une assiette fiscale pour financer des projets pharaoniques comme le reboisement de l’Afrique de l’Est à l’Ouest. De grands projets internationaux de préservation de la nature pourraient être financés. Certains diront que nous avons déjà, en France, la taxe Chirac (la taxe de solidarité sur les billets d’avion, Ndlr). C’est un débat. Mais oui, il faut s’attendre à des prix de billet d’avion poussés à la hausse par l’augmentation tarifaire du kérosène, voire par une fiscalité nouvelle sur le kérosène.

L’aérien est aussi pointé du doigt pour son impact écologique… Pourriez-vous imaginer d’ajouter le train sur votre site ?

Fabrice Dariot : Nous pouvons l’imaginer. Faut-il le souhaiter ? Je suis très inquiet d’un éventuel monopole ferroviaire (sur certaines liaisons, Ndlr). Les prix seraient particulièrement élevés. La SNCF n’est pas un transporteur bon marché, et l’hypothèse d’une grève dure comme fin 2019 pose question.

On ne peut pas le nier, le transport aérien est un contributeur d’émissions de CO2, à hauteur de 2% à 3% au niveau mondial. Mais aujourd’hui, c’est le numérique avec ses immenses data centers qui est en train de faire exploser les émissions de CO2. Or nous digitalisons la planète entière. La plus grande inquiétude pour moi, au niveau du CO2, n’est pas dans l’immédiat l’aérien, mais le digital. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut rien faire au niveau de l’aviation. Nous devons utiliser des carburants qui polluent moins. Certains comportements doivent être aussi plus vertueux. Le voyage caricatural de 4 nuits à Noël à Bali, au départ de l’Europe, va peut-être disparaître. Suite à la crise sanitaire, les gens vont éventuellement voyager moins et plus longtemps. Peut-être que la consommation des produits aériens va changer compte tenu de la sensibilité des gens au gaz à effet de serre. 

Les Etats-Unis repartent fort (…). Nous avons observé un filet d’activité vers la Thaïlande.

Quelles sont les destinations qui redécollent vraiment ? 

Fabrice Dariot : La reprise reste partielle puisque tous les pays du monde n’accueillent pas les Français à bras ouverts, dans les mêmes circonstances. Les Etats-Unis repartent fort. Beaucoup de personnes voulaient ou devaient se rendre sur place avant la pandémie. New York, la Floride, Californie, mais aussi des villes comme Pittsburg et Denver profitent de la réouverture des frontières. C’est une vraie ruée vers l’ouest, en termes de prises de commandes, notamment pour la fin de l’année. Les Français étaient vraiment derrière la porte, ils trépignaient d’impatience en attendant le feu vert des autorités américaines. Les prix ne s’envolent pas, puisque le marché français bénéficie d’une importante programmation aérienne. De nombreuses compagnies européennes et américaines ont multiplié les capacités vers l’Amérique du Nord.

Par ailleurs, deux destinations long-courriers n’ont jamais faibli, Dubaï et le Mexique. Ce sont des pays qui sont toujours demeurés assez ouverts aux touristes étrangers depuis le début de la crise. Dubaï est à la mode auprès d’un certain public, le Mexique est longtemps resté la seule destination américaine ouverte. Par ailleurs, l’Océan indien repart bien, fort de ses destinations touristiques haut de gamme : La Réunion, Maurice, Zanzibar. Les Dom-Tom aussi, surtout la Guadeloupe. En Afrique, le Cameroun, le Sénégal et la Côte d’Ivoire marchent plutôt bien.

A contrario, quelles destinations restent en panne ?

Fabrice Dariot : Le Maghreb ne tient pas toutes ses promesses. L’Algérie voudrait redécoller. Mais la situation sanitaire, les difficultés de remboursement avec Air Algérie et les tensions diplomatiques entre la France et l’Algérie freinent la reprise. Concernant le Maroc, qui s’est brutalement fermé aux voyageurs d’Allemagne (notamment), c’est également complexe. Pour la Bourse des Vols, la Tunisie, qui s’est réorientée vers une clientèle de proximité, n’est plus ce qu’elle était. L’Asie ne redémarre pas vraiment. Nous avons observé un filet d’activité vers la Thaïlande, quand les bonnes nouvelles de la destination ont été relayées par L’Echo touristique. C’est tout. Les perspectives de confinement dans un hôtel représentent un frein considérable. On sent que cela trépigne sur le Japon. Quand les portes vont s’ouvrir, les gens vont se précipiter, pour des motifs loisirs et affaires.

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