Concurrence : les agences de voyages gagnent contre Voyages-sncf.com
Suite à une plainte de Selectour Afat, la SNCF s'est engagée à moins privilégier Voyages-sncf.com, et ce, auprès de l'Autorité de la concurrence.
Les agences de voyages vont enfin pouvoir lutter à armes presque égales avec Voyages-sncf.com (VSC).
Suite à une plainte d’AS Voyages qui dénonçait les conditions préférentielles accordées par la SNCF à sa filiale Voyages-sncf.com, l'Autorité de la concurrence a donné raison au réseau désormais dénommé Selectour Afat. Plusieurs pratiques de la SNCF "tant tarifaires que relatives à l’organisation même de la distribution de produits ferroviaires (…) sont susceptibles d’être qualifiées au titre de l’abus de position dominante", explique la décision du 2 octobre.
L'Autorité de la concurrence précise que les agences de voyages "étaient traitées par la SNCF différemment et sans justifications objectives par rapport à sa filiale voyages-sncf.com". Pour elle, "le fait de mettre à la disposition des agences une grille tarifaire dont les coûts d’entrée sont artificiellement élevés est de nature à constituer une barrière à l’entrée" ou le fait que VSC ait accès aux informations stratégiques de ses concurrents. De fait, le prix au dossier voyage payé par un opérateur peut-être 12 à 15 fois plus élevé que celui payé par VSC.
12 engagements incluant la rémunération
Suite à ce constat, la SNCF a pris 12 engagements, soumis à consultation des acteurs du marché (voir test de marché du 28 avril 2014), pour éviter que VCS bénéficie d'un traitement préférentiel en termes de facturation, de commissions et d'accès aux informations.
Le groupe ferroviaire propose "d'appliquer à VSC les mêmes conditions de rémunération que celles actuellement appliquées aux agences de voyages dans le cadre de la convention SNAV".
Un engagement prévoit aussi de revoir les coûts et les conditions d’accès aux interfaces de la SNCF. L’accès au système WDI, 68 000 euros par an, sera supprimé. Toutefois, les entreprises qui utilisent le service Ravel Gold devront désormais payer une facture minimale de 12 000 euros/an, ce qui représente une facturation pour environ 300 segments (PSEG) par mois.
Equité, aussi, dans le partage des données
Le groupe SNCF s’est également engagé à fournir aux agences et aux GDS l’accès à une version de l'outil SIDH (Service d'Itinéraire et de Données Horaires) étendue aux offres iDTGV et OUIGO, et cela gratuitement. L’Autorité de la concurrence avait relevé que le site Sncf.com n'affichait pas les horaires sur ses pages, mais renvoyait directement vers le site Voyages-sncf.com pour permettre la réservation "avec le risque que sa filiale ne capte le trafic en profitant de la marque SNCF". Ce lien n'existera plus.
D’autres engagements concernent la réorganisation des outils Ravel, "en envisageant la migration conditionnelle de certaines fonctionnalités vers les GDS" et la mise en place "d’un programme permettant la participation des agences et/ou des GDS à l'expérimentation de nouveaux outils, nouvelles offres ou fonctionnalités de distribution".
Un précédent en 2009
Enfin, la SNCF s’est engagée à garantir la confidentialité des demandes des agences concurrentes de Voyages-sncf.com, notamment grâce à la nouvelle organisation.
Les sociétés Lasminute, Karavel et AS Voyages avaient saisi l’Autorité de la concurrence le 7 mai 2010 de pratiques mises en œuvre par la SNCF. Les deux premières se sont désistées en 2010 et 2011. De son côté, le réseau de distribution n'avait pas lâché l'affaire, qu'il remporte. Mais ce n'est pas le premier à obtenir une victoire. Saisi par Karavel/Promovacances, Lastminute et Switch, le Conseil de la concurrence avait infligé en 2009 une amende de 5 millions d'euros à la SNCF pour avoir favorisé son agence en ligne au détriment de ses concurrents. L'américain Expedia, chargé des réservations de voyages, avait du débourser 500 000 euros.
Voyages-sncf.com réalise plus de 3 milliards de ventes chaque année, dont plus de 90% des ventes proviennent du train. Selon le top 10 des sites de tourisme publié par Médiamétrie//NetRatings au second trimestre 2014, le site arrive en tête avec 6,77 millions de visiteurs uniques par mois, devant Booking.com. Une position de leader que nombre d'observateurs ont jusqu'alors associé à sa situation de quasi monopole.
