César Balderacchi, président atypique du Snav (EdV), nous a quittés
Ancien président du Syndicat national des agences de voyages (Snav), ce fils d’émigré italien sans diplôme était rentré par la petite porte dans le monde du tourisme, au sein du réseau Waastels. C’est le président qui sera resté le plus longtemps à la tête du Snav, de 1993 à 2005.
C’est une personnalité que les professionnels du voyage de moins de 25 ans ne peuvent connaître. César Balderacchi, ancien président du Syndicat national des agences de voyages (Snav) de 1993 à 2005, nous a quittés lundi, à l’âge de 81 ans. « Il est resté 12 ans à la tête du syndicat, un record ! », tient d’abord à rappeler Jean-Pierre Mas, le président des Entreprises du Voyage qui a remplacé le Snav en 2016. De lui, il garde le souvenir d’une personne « fougueuse », « pugnace », « qui n’avait peur de rien » et « qui possédait, surtout, un sens politique acéré ». De fait, c’est un peu par défaut, pour éviter des batailles d’égo entre patrons de TO et de réseaux, que César décroche le fauteuil de président du Snav en 1993 avant d’y prendre ses aises et de s’y accrocher fermement pendant 4 mandats.
Un président d’origine modeste
Né en 1941, fils d’immigré italien dont le père travaillait dans le bâtiment, César Balderacchi vit de petits boulots avant de décrocher un poste chez le distributeur belge Waastels dont il vendait sur les chantiers des billets de train France-Italie aux travailleurs d’origine italienne puis les fameux billets Bige qui permettaient aux jeunes de voyager à petit prix dans les rames de la SNCF. Son côté débrouillard impressionne René-Charles Waastels, le patron de ce réseau né en Belgique, qui le prendra sous son aile jusqu’à en faire son directeur des ventes puis directeur de la communication !
A la tête du syndicat, il eut à suivre la bonne mise en application de la loi de 1992 sur la protection du consommateur et à batailler contre la baisse des commissions versées par les compagnies aériennes qui volaient plein gaz vers la « commission zéro » avec Air France en chef d’escadrille. « C’est un accord en béton gravé dans le marbre » s’exclamera-t-il lors de la signature de l’accord avec la compagnie nationale se souvient Jean-Pierre Mas. Car César Balderacchi étai aussi le « pro » de la plaisanterie voulue et surtout involontaire qui faisait toujours sourire l’auditoire pendant les congrès du Snav ou de réseaux volontaires. On se souvient ainsi aussi de son fameux « il ne faut pas tuer la poule aux yeux d’or ».
Un congrès qui compte double
« Certaines phrases étaient bonnes. D’autres moins », s’amuse René-Marc Chikli, le président du Seto qui épaulait à l’époque César comme vice-président du Snav. « Cela faisait partie du personnage ». Tout comme ses manières sans chichi à l’image de cette petite tape amicale portée sur la joue de Vincente Fox lors du congrès du Snav à Merida. Le président mexicain et ses gardes du corps en étaient restés comme deux ronds de flan.
Si cette épisode a marqué les esprits, René-Marc Chikli préfère se souvenir « d’un congrès en Egypte prévu pour 600 personnes où il a fallu gérer 1200 participants doublant ainsi les difficultés d’organisation reposant sur une flotte de bateaux sur le Nil ». « César était une personnalité attachante », résume Jean-Pierre Mas, président des entreprises du Voyage (ex-Snav), qui l’avait encore régulièrement au téléphone, chaque trimestre. « Il aimait prendre des nouvelles de la profession », conclut celui qui l’a souvent côtoyé du temps d’Afat Voyages. D’autres professionnels, et notamment d’anciens collaborateurs du Snav qui l’ont côtoyé au quotidien, se souviennent de ses colères homériques.
A l’issue du 46ème congrès de Pékin en 2005, César Balderacchi passa la main à la tête du syndicat à Georges Colson, l’ancien patron de Fram lui aussi disparu cette année, en mars dernier. Il y a encore quelques années, il n’était d’ailleurs pas rare de croiser ces deux mastodontes du tourisme bras dessus bras dessous déambulant dans les allées du salon IFTM Top Resa, qui, hasard du calendrier, ouvre ses portes mardi. De nombreux hommages leur seront rendus durant ces trois jours, à n’en pas douter.
_____________________________________________
Ma première rencontre avec César : une histoire de tribune !
Mon premier contact avec César Balderacchi s’est déroulé en 1995, lui dans son premier mandat à la présidence du Snav, moi jeune journaliste débutant au sein du magazine Décisions Tourisme. Mon rédacteur en chef avait décidé de lui accorder une tribune en tête du journal afin d’exposer ses projets pour le syndicat. Ne voyant rien venir à l’approche du bouclage du magazine, j’allais m’enquérir des nouvelles concernant cette tribune auprès de mon « red chef ». « Tu n’a rien compris » me répond-t-il. « César n’écrira pas un mot. Tu dois aller l’interviewer et rédiger toi même la tribune… ». Me voilà donc quelques jours plus tard dans le bureau de César au siège du Snav, rue Villaret de Joyeuse, près de l’Arc de Triomphe. « La Tribune, un journal que je lis tous les jours », me dit-il en m’accueillant cordialement. Et moi de lui expliquer que je ne suis pas journaliste pour ce journal économique mais que je viens l’interroger pour écrire une tribune dans Décisions Tourisme. L’entretien se déroule tant bien que mal. Au moment de le quitter, il me sert la main en me disant : »Je vous lis donc demain matin dans La Tribune ! ». Et moi de partir un peu déconfit, tentant de garder le sourire et n’osant pas à nouveau relever son erreur…
Merci pour cet hommage !