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Air France demande des comptes aux agences

Plusieurs distributeurs ont détourné certains tarifs négociés réservés aux entreprises. Air France multiplie les contrôles, lesquels ont déjà entraîné la suspension d'émission de billets pour plusieurs agences.

distributeurs, et non des moindres, selon les confidences de certains professionnels, auraient porté préjudice à Air France, à travers ce qu'il convient d'appeler des malversations.

Le principe ? Des agences, pour conserver certains clients affaires ou pour attirer de nouvelles PME-PMI chez elles, leur auraient proposé des tarifs négociés très avantageux. Tarifs qui ne leur étaient pas destinés, mais étaient consentis par Air France à d'autres sociétés dont les volumes importants de billets justifient des accords particuliers (la compagnie a signé environ 5 000 contrats avec des entreprises dans l'Hexagone). Certaines agences seraient allées encore plus loin et auraient réalisé de belles marges, en réservant les tarifs négociés les plus avantageux, mais en facturant à leurs clients des billets au tarif plein.

Si certains distributeurs ont, semble-t-il, fauté de manière épisodique, d'autres auraient érigé cette pratique frauduleuse en système, l'appliquant pour certains dans les différents points de vente qui composent leur miniréseau. Bref, un véritable détournement organisé… Le pot-aux-roses a été découvert par Air France lors de contrôles dans les aéroports, avant que certains responsables voyages de grandes entreprises n'alertent la compagnie, après avoir constaté un décalage entre ce qui leur était facturé et la réalité des voyages effectués. "Cela discrédite toute la profession, on peut même parler de concurrence déloyale", dénonce le directeur d'un miniréseau membre de Sélectour, qui préfère garder l'anonymat.

"Un abus de confiance"

Plusieurs réunions ont déjà eu lieu sur le sujet avec des représentants de la commission Air du Syndicat national des agences de voyages (Snav). Mais Christian Boireau, DG en charge du commercial France d'Air France, n'a pas pris de gants pour aborder ce dossier épineux avec ses principaux distributeurs, au cours du déjeuner de son Club des partenaires privilégiés, à Top Resa. Il juge cette fraude "inadmissible".

Elle a obligé Air France à mettre en place depuis cet été une cellule spéciale, baptisée "Contrôle qualité des processus agences de voyages". Trois personnes y traquent à plein temps ces pratiques, y compris pour les points de vente d'Air France, via un comptage des émissions de billets, des croisements et des historiques. "Nous sommes habilités si nécessaires à remonter plusieurs années en arrière" précise Frédéric Alory, directeur des ventes agences chez Air France. "Nous assimilons ces pratiques irrégulières à un abus de confiance. Dans le cadre du contrat Iata, les agences sont nos mandataires et nous leur déléguons une responsabilité pour émettre notre billetterie. On ne peut pas connaître tous les voyageurs d'affaires qui prennent l'avion au nom d'une société et bénéficient de tarifs négociés. La relation de confiance avec les agents de voyages jouent pleinement."

De coûteuses représailles

Pour le moment, Air France estime à moins d'une vingtaine le nombre d'agences qui auraient fraudé. Chez certains professionnels ayant institutionnalisé le système, le manque à gagner pour la compagnie se chiffrerait à "plusieurs centaines de milliers d'euros", voire friserait le million pour un miniréseau parisien, dont le nom est tenu secret. Ce dernier a dû faire face à une fermeture momentanée des émissions de billets d'Air France, le temps que les irrégularités cessent et qu'un compromis financier soit trouvé avec la compagnie. "C'est un moyen de représailles coûteux de la part d'Air France. Car cela oblige à faire émettre les billets par une autre agence, qui vous facture évidemment des frais de services", précise un professionnel. Pour autant, Air France reste discrète et ne souhaite pas jeter l'opprobre sur un distributeur plutôt qu'un autre. "Cela concerne plusieurs réseaux", précise seulement Agnès Gascoin, directrice de la distribution chez Air France.

Jean-Pierre Mas et Richard Vainopoulos, respectivement président d'Afat Voyages et de Tourcom, précisent toutefois ne pas avoir connaissance de fraudeurs parmi leurs adhérents.

Des règles identiques pour tous

"C'est l'oeuvre d'indépendants", juge Richard Vainopoulos, qui estime par ailleurs que "cette cellule de contrôle va coûter une fortune à Air France". Plus chère qu'elle ne rapporterait ? "Sélectour n'est pas responsable des actes individuels de ses membres", déclare pour sa part Martine Granier, DG du réseau à l'hippocampe, alors que les noms de plusieurs de ses adhérents circuleraient dans cette affaire. "Il existe des règles dans la profession et elle doivent être appliquées par tous." Sélectour précise ne pas être au courant des éventuels montants en jeu, en l'absence de paiements centralisés au niveau de la coopérative concernant la billetterie.

Pour ne pas jeter d'huile sur le feu, Air France a décidé de ne pas redresser les agences sur plus d'une année, veut négocier chaque fois que possible avec les distributeurs incriminés, et pourrait fermer sa cellule de contrôle une fois l'affaire close. Avec sa casquette de président de la commission Air au Snav, Jean-Pierre Mas précise avoir demandé à la compagnie de "faire la part des choses entre une erreur commise par un vendeur et une pratique quasi-industrialisée mise en place par quelques patrons, faussant les règles de la concurrence entre agences, et privant Air France de revenus justifiés."

Une compréhension qu'Air France affirme être prête à accorder aux tricheurs involontaires, promettant de ne pas faire l'amalgame avec l'ensemble de la profession. Pour les autres, le couperet pourrait être terrible et entraîner dans le pire des cas la fermeture de points de vente, alors même qu'Air France représente parfois plus de 50 % de l'activité des agences. "Nous voulons simplement mettre un terme à ces pratiques et éviter qu'elles ne se reproduisent. Il faut éviter que cela rejaillisse sur la profession. Cela met Air France en porte-à-faux vis-à-vis des agences, mais aussi des entreprises bénéficiant de tarifs négociés", conclut Frédéric Alory

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