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Pourquoi la destination France risque de perdre son leadership

Un rapport, qui dresse un portrait au vitriol d'Hexatourisme, montre combien la France a des pieds d'argile sur l'échiquier mondial des destinations. En témoignent les données 2014 de fréquentation touristique.

 

Le tourisme, grande cause nationale ? Il y a urgence. La destination France perd du terrain, souligne le rapport d'information enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale le 10 février 2015 : même si notre pays s'enorgueillit d'être première destination au monde, avec 402 millions de nuitées marchandes en 2014, il est désormais talonné par l’Espagne qui en a comptabilisé 401 millions (source Eurostat). Or ce nombre n'a de cesse de progresser de l’autre côté des Pyrénées, alors qu’il recule chez nous.

Quand l'Espagne prend la France de vitesse

Pire : en retirant de ces statistiques les nuitées des ressortissants de chaque pays, la France est "largement distancée" par l’Espagne en nombre de nuitées de touristes étrangers, rappelle ce rapport de 154 pages dédié à l’impact du numérique sur le secteur touristique français, rédigé après l'audition de quelque 120 professionnels du secteur. En 2014, l'Espagne a ainsi attiré 260 millions de touristes non-résidents, toujours en nombre de nuitées, contre 184 millions en Italie, et 131 millions en France. Le tourisme de transit est une réalité hexagonale : 16,8% des touristes en France n’y demeurent qu’une nuit, 31% deux nuits ou moins. La dépense quotidienne moyenne d’un touriste étranger atteint d'ailleurs 62 euros.

Rappelons aussi que notre pays se hisse au troisième rang en volume de recettes générées par le tourisme international, derrière les États-Unis et l’Espagne. "Un effort significatif est donc nécessaire pour valoriser l’accueil des visiteurs", insiste le rapport présenté par Daniel Fasquelle, président, et Pascale Got, rapporteure.

Les raisons de l'échec d'Hexatourisme

Franceguide.fr et le projet mort-né Hexatourisme sont présentés dans ce document comme "le serpent de mer de la plate-forme nationale". Pour les responsables de la Fédération nationale des comités régionaux du tourisme (FNCRT), "on tourne autour du pot depuis quinze ans, et on a tout planté". D'après le président de la fédération, il faut peut-être arrêter de rêver à une structuration nationale du numérique "qui s’avère chimérique".

Yves Tyrode, ex-DG de VSC, explique l’échec du projet Hexatourisme par le fait que la nouvelle société aurait dû vendre des prestations touristiques aux régions, qui vendaient elles-mêmes aux sites d’e-tourisme pour la commercialisation. "Or il n’y a pas eu assez de régions participantes et le projet souffrait d’une réelle sous-capitalisation", poursuit le document parlementaire. En juin 2013, la place de marché, créée avec la Caisse des Dépôts et Consignation et Atout France, était connectée à quatre régions (Rhône-Alpes, Bourgogne, Bretagne et Aquitaine), avait précisé Yves Tyrode, lors d'une conférence de presse. La conclusion d’Yves Tyrode, devenu depuis DG du numérique de la SNCF, est sans appel : "Si nous voulons réussir dans nos entreprises, il faut arrêter ce Clochemerle !".

Au printemps 2012, Voyages-sncf.com et Atout France étaient pourtant plus qu'enthousiastes à l'idée de développer ce moteur de recherche de l'information touristique en France, qu'elle soit marchande ou non. La filiale de la SNCF promettait alors d'apporter dans la corbeille 45% des 2 millions d'euros de capital, ainsi que son savoir-faire.

Des recommandations pour la France

Le rapport du 10 février 2015, présenté par Daniel Fasquelle, président, et Pascale Got, rapporteure, vise à tirer la sonnette l'alarme concernant la France, mais aussi à formuler des préconisations, au demeurant plutôt génériques. La destination aurait ainsi une bataille à gagner sur trois plans :

– Au niveau juridique, "il lui faut lutter contre les abus constatés dans le domaine du droit de la consommation", notamment en termes d'avis voyageurs, et "contre les pratiques déloyales portant atteinte au droit de la concurrence".

– "Sur le plan économique, il importe de soutenir les acteurs français les plus performants tels que Voyages-sncf.com ou Easyvoyage.com", de faire jouer la concurrence entre les différentes plates-formes, de "faire mieux collaborer avec les offices du tourisme et les autres acteurs institutionnels".

– Sur le plan fiscal, il est "inacceptable que certains acteurs cherchent à  échapper à la taxe de séjour ou à l’impôt sur les sociétés alors même qu’ils créent de la valeur ajoutée en France". Que les acteurs de l’e-tourisme soient basés ou non en France, ils doivent "apporter une meilleure contribution aux charges publiques" par des mesures visant à davantage d’équité fiscale. Booking et Airbnb font partie des géants étrangers dans le viseur de tels commentaires.

Malgré les échecs en la matière depuis 15 ans, Pascale Got, rapporteure de la mission, préconise aussi la relance d’un portail unique "nourri de contenus percutants fournis par les institutions touristiques de tous niveaux". "Le pilotage de cette mission pourrait être confié à Atout France", poursuit-elle, en appelant à l'évolution du mode de fonctionnement et des ressources de l'organisme de promotion. "Nos auditions ayant fait apparaître des tiraillements entre les différentes institutions concernées, il conviendra que l’Agence fasse converger vers elle l’ensemble de la filière". Et de pointer, aussi, le fait que les "producteurs de contenu touristique" sont insuffisamment formés à l’utilisation des outils numériques, et s’en trouvent pénalisés. D'où l'idée de mettre en place des programmes de formation professionnelle aux métiers du tourisme, comprenant un volet numérique.

Notre pays est-il à la hauteur de ses ambitions ? "La France a été trop laxiste en matière d’achat des noms de domaine", rappelle encore les députés, qui citent un exemple assez éloquent : le site France.com existe, mais c’est celui d’une agence de voyages située… en Floride.

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