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Le sociologue Rodolphe Christin critique la « machine industrielle » du tourisme

Surtourisme, honte de prendre l’avion, tourisme responsable… Le sociologue est venu débattre avec des pros du secteur sur tous ces sujets. On débriefe.

Le sociologue Rodolphe Christin était récemment l’invité du Club Tourisme et Technologie (CTT), un think tank de décideurs de l’e-tourisme dont L’Echo touristique est partenaire. L’occasion d’évoquer, avec près de 20 professionnels du secteur, des thèmes hautement sensibles comme le surtourisme et le « flygskam« . Nous l’avons interviewé à l’issue du débat.

L’Echo touristique : Vous étiez l’invité d’honneur d’un déjeuner-débat le 6 septembre organisé avec des professionnels du secteur, dans le cadre du CTT. Que retenez-vous des échanges ?

Rodolphe Christin : Les professionnels du tourisme reconnaissent en partie les méfaits causés par le tourisme, ce dont on peut se réjouir. Mais, face notamment au surtourisme, leurs marges de manœuvre sont étroites. Les solutions viendront davantage des pays, des villes, des habitants, des instances politiques. Ce qui m’a étonné lors de ce déjeuner-débat, c’est l’appétence des acteurs pour les systèmes de compensation de CO2, comme pour neutraliser les dégâts causés. Plutôt que de compenser avec des forêts artificielles, il serait à mon sens préférable de ne pas détruire.

Vous êtes ainsi pour la décroissance, dans tous les secteurs ?

Oui, je suis pour la sortie de la société de consommation en général. Il faut désaménager le monde. Le tourisme est devenu une grosse machine industrielle qui détruit, d’une certaine manière, ce dont elle vit. Il faut essayer de sauver l’esprit de découverte, le défendre, ce qui implique d’aller à l’encontre des logiques de croissance touristique et de recherche sans limite de profits. L’industrie paraît extrêmement forte, mais elle est en réalité fragile, car dépendante des flux extérieurs. Le jour où les contraintes écologiques liées à la rareté des ressources s’amplifieront, le secteur sera parmi les premiers à en subir les conséquences.

Vous être critique à l’égard du secteur. Pourtant, vous avez voyagé dans plusieurs pays étrangers. Vous avez même été accompagnateur dans le Sahara libyen…

J’ai pratiqué le tourisme comme tout le monde. J’ai effectivement été accompagnateur en Libye, pendant seulement une saison. Mes voyages m’ont amené à réfléchir au secteur du tourisme. Je suis un désenchanté touristique. Aujourd’hui, je voyage nettement moins à titre privé. Quand on m’invite en tant que sociologue, comme l’ont fait cette année les Entreprises du Voyage à Madère, j’accepte volontiers. Mais à titre personnel, je n’ai pas pris l’avion depuis 2012. Aujourd’hui, je critique le tourisme en tant que système, mais pas les individus qui le pratiquent.

Quel est votre regard sur le tourisme responsable ?

C’est bien évidemment mieux que le tourisme de masse. Mais il s’ajoute au tourisme existant. Le jour où les gens se rueront dessus, le tourisme alternatif… disparaîtra.

La meilleure répartition des flux ne trouve pas grâce à vos yeux ?

Non. Cela satisfait les professionnels du secteur et les élus, mais on continue d’emmener les gens sur plusieurs lieux au lieu d’un seul. On ne peut plus poursuivre sur notre lancée alors que des mouvements contestent le bien-fondé de certains projets. Le consensus touristique n’est plus acquis.

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