Guillaume Linton (Asia) : « Nous faisons le pari de 2021 »

L’Echo touristique : Asia vient d’annoncer la suspension de ses départs jusqu’au 15 décembre 2020. Pourquoi avoir pris cette décision dès maintenant ?

Guillaume Linton : Notre idée est simple : nous voulons faciliter la rentrée de nos partenaires agents de voyages, en leur donnant le temps, dès maintenant et sans attendre la date butoir du 15 septembre, d’informer leurs clients de la suspension de nos voyages. Cela devrait leur permettre de déclencher ensuite les avoirs puis les reports, tels que prévus dans le cadre de l’ordonnance pour tous nos départs jusqu’au 15 décembre 2020.

La fin de l’année 2020 est donc définitivement compromise ?

Guillaume Linton : Au vu des informations que nous obtenons de nos différents partenaires, à destination, et au regard de l’évolution de la crise sanitaire à l’échelle internationale, nous savons que la majorité de ces départs sont déjà compromis. Nous conservions un espoir pour Bali, ou pour la Thaïlande, mais les annonces gouvernementales de ces deux pays les ont vite douchés. La plupart de nos destinations – et particulièrement en Asie du Sud-Est – ont très bien contenu l’expansion du virus sur leurs territoires. Et rien ne laisse penser qu’ils prendront le risque d’ouvrir leurs frontières aux touristes occidentaux venant de pays ou régions où le virus circule encore activement. Tout ça ne s’inscrit donc pas dans un contexte où la clientèle française aurait peur de voyager.

Car la demande existe pour cette fin d’année ?

Guillaume Linton : Elle existe, notamment venant de la part de nos clients qui n’ont pas pu voyager ces derniers mois. Ceux qui avaient acheté un voyage au Japon -la destination la plus importante pour nous en termes de volume pendant le printemps- avaient le désir de voyager pendant les vacances de la Toussaint. Donc, une grande partie de notre clientèle s’était repositionnée sur la fin de l’année 2020. Désormais, nous préférons favoriser, comme depuis le début de cette crise, un report sur le même voyage, aux mêmes dates, et aux tarifs garantis, à N+1, c’est-à-dire en 2021.

2021 sera donc l’année de la reprise ?

Guillaume Linton : Nous l’espérons fortement, même si les messages que nous recevons du monde entier laissent encore beaucoup de place aux incertitudes. Mais nous faisons le pari de 2021. Asia aura une offre en 2021, et même une offre plus étoffée qu’en 2020. Notre brochures « Tentations », qui regroupe notre offre de circuits en GIR, sera d’ailleurs bientôt distribuée aux agences de voyages. Elle sera plus adaptée aux nouvelles attentes de notre clientèle, en faisant par exemple la part belle aux petits groupes (de 16 à 18 pax, contre 22-24 auparavant), ou en favorisant les départs en basse-saison. Nous lancerons également une nouvelle gamme « Aventure », pour séduire une clientèle active, qui veut enrichir la découverte traditionnelle d’une destination avec des pratiques sportives (marche, vélo, kayak, …). Toutes ces mesures nous offrent des solutions pour disperser notre clientèle, dans le temps et dans l’espace. C’est, selon moi, le rôle d’un tour-opérateur spécialiste : anticiper.

La marque Asia a fait parler d’elle, cet été, avec une offre France construite en quelques semaines. Est-ce que l’expérience sera renouvelée ?

Guillaume Linton : Cette reconversion était momentanée et temporaire. Nous avons vocation à opérer de nouveau en Asie et dans le Pacifique dès que cela sera possible. Mais nous avions la volonté de prouver notre agilité et notre créativité, tout en maintenant le lien avec nos clients et nos partenaires agents de voyages. Proposer des alternatives en France à nos clients qui avaient réservé de beaux dossiers pour l’Indonésie, la Thaïlande ou le Vietnam, c’était aussi montrer notre savoir-faire, et la qualité de notre service. C’est aussi une fierté, en interne, d’avoir été capables de monter cette offre en six semaines, avec les contraintes qui ont touché toute l’industrie, et même au-delà (chômage partiel, télétravail, …). Enfin, c’était aussi une façon de contribuer, à notre échelle, à la relance du secteur en France. Nous sommes largement soutenus depuis le début de la crise, et nous devions renvoyer l’ascenseur en faisant de ce que nous savons faire, en Asie comme en France.

Commercialement, l’opération a été intéressante ?

Guillaume Linton : En tout cas, cela nous a permis de conforter le niveau de notoriété de la marque Asia en B2B, tout en nous offrant un coup de projecteur auprès du grand public. Bien sûr, à terme, nous espérons que cela génère du recrutement client. Mais, pour cet été, nous n’avons eu qu’une poignée de dossiers concernant de nouveaux clients. Nous avons fait voyager environ 150 clients – principalement des reports – ce qui est très loin de notre volume moyen habituel sur la saison (6 000 clients). Donc, financièrement parlant, ça n’a pas du tout compensé notre perte d’activité. Mais nous avons réussi à maintenir le lien avec nos clients, tout en nous confortant sur notre capacité à nous réinventer. Et, si la situation devait durer, cette expérience nous servirait pour étoffer notre éventuelle offre en France, voire dans les pays limitrophes.

*Tous les départs d’Asia sont suspendus jusqu’au 15 décembre 2020, hormis ceux à destination de Dubaï et des Maldives, deux destinations encore accessibles.