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Courtiers : la fin de l’âge d’or

– Le contexte : Les compagnies d’assurance n’acceptent plus de perdre d’argent dans l’activité voyage. Depuis deux ans, elles durcissent leurs contrats.- Le constat : Face aux augmentations tarifaires quasi-généralisées, les intermédiaires n’ont que deux choix : répercuter la hausse ou rogner leurs commissions.- La question : Dans ce mouvement de recomposition, les courtiers, autrefois présentés comme les maîtres du jeu, pourraient-ils deve

La fête est bel et bien finie. Sous pression de leurs maisons mères, confrontées à la crise financière et au renforcement des obligations réglementaires, les assureurs voyage sont passés depuis deux ans en mode redressement. « Il est révolu le temps où les compagnies fermaient les yeux sur les pertes qu’elles faisaient dans le secteur du voyage sous prétexte que ce n’était qu’une goutte d’eau dans l’ensemble de leurs activités, résume Boris Reibenberg, président du courtier Présence Assistance Tourisme. Désormais, elles imposent une rentabilité sur toutes leurs lignes. »

Que faut-il comprendre par « rentabilité » ? 5 à 15 % de marge en moyenne, disent les assureurs. 5 à 7 %, nuancent les courtiers, qui connaissent presque tous les secrets des compagnies avec lesquelles ils font affaire. « La plupart en sont encore très loin », estime Stéphan Chaubet, président du cabinet de courtage éponyme, mais la valse des contrats, elle, bat son plein. Mécontents de voir les conditions commerciales se raidir en leur défaveur, nombre de distributeurs (agences, TO, etc.) ont en effet décidé de faire jouer la concurrence en pariant qu’ils trouveront mieux ailleurs.

« On a passé l’année dernière à répondre à des appels d’offres », confirme Matthieu Drouet, DG du courtier April International Voyages, qui annonce avoir perdu du chiffre d’affaires en 2012 mais maintenu le résultat à l’équilibre. Dans ce grand remue-ménage, c’est Europ Assistance qui, de l’avis général, a le plus serré la vis, après avoir longtemps fait figure de dynamiteur du marché à coups de nouveautés et de prix agressifs. « Ils ont décidé qu’ils devaient gagner 15 % sur tous les contrats donc ils résilient à tour de bras, confirme Geoffroy Bonnet-Eymard, gérant du courtier Chapka. Mais c’est illusoire de penser qu’un assureur ne peut garder que des affaires rentables et laisser toutes les mauvaises à ses concurrents. »

Chez Europ Assistance, Sylvain Rouffaud, directeur commercial et marketing pour la France, reconnaît seulement une « baisse du CA tourisme en 2012 » et « la perte de certains clients lorsque nous avons décidé de redresser leurs contrats en augmentant les prix. Mais en aucun cas nous ne laissons tomber l’activité voyages. » Des hausses de prix, de toute façon, quasiment tous les assureurs en ont pratiqué. Y compris ceux qui sont dans une position de conquête de parts de marché. C’est le cas en particulier de Mapfre / L’Européenne d’Assurances, qui est reparti à l’attaque l’an dernier après un an de flottement, augmentant son CA de 18 % par rapport à 2011, à 23 ME, pour un résultat financier tout juste à l’équilibre. « Tous les comptes que nous avons récupérés, nous les avons pris plus chers qu’ils n’étaient auparavant, mais en plaçant des garanties ou des services complémentaires, éventuellement sous forme d’options à la carte, comme de la conciergerie, commente Alexandre Coyas, DG. Les distributeurs doivent comprendre que nous offrons un service, et pas seulement un tarif. »

LES ASSUREURS ONT REPRIS LES RÊNES

Mais qui, alors, supporte ces hausses tarifaires ? Pas les distributeurs, manifestement (voir encadré). Ceux qui pourraient bien avoir le plus pâti du raidissement des compagnies d’assurances, en réalité, ce sont les courtiers. « Historiquement, ils tenaient le marché, avec une très grande liberté d’action, une exception dans le monde de l’assurance », explique Stéphan Chaubet. Mais en quelques années, les assureurs ont repris les rênes. « Les courtiers restent très durs en affaires, mais nous avons réussi à redéfinir les règles », confirme Alexandre Coyas. Résultat : le courtage spécialisé dans le tourisme a dû accepter des taux de commission globalement à la baisse l’an dernier. « Nous sommes descendus de 15 à 14 % en moyenne », concède Stéphan Chaubet. Une diminution des recettes qui n’a pas été compensée par une baisse des coûts. Au contraire, « la recrudescence des sinistres, liée au contexte économique qui pousse davantage de consommateurs à faire jouer l’assurance, y compris avec de faux certificats médicaux, a généré pour nous une hausse des coûts de gestion », poursuit Stéphan Chaubet, qui annonce en revanche une croissance de 18 % son CA en 2012, à 20 ME de primes émises.

Est-ce à dire que le courtage est menacé dans le secteur du voyage ? On en est très loin. « Les courtiers ont une vraie valeur à apporter en matière d’innovation dans les produits et les services », rappelle Nicolas Delorme, directeur commercial d’Axa Assistance France (qui réalise 70 % de son activité voyage via le courtage). « Et surtout, à de rares exceptions près, les assureurs n’ont pas les moyens de faire de l’animation commerciale, donc les courtiers leur sont indispensables pour aller chercher de nouveaux clients », ajoute Christophe Jeanmet, responsable du développement assurances voyage chez Ace Europe (qui a réalisé 7 ME de CA tourisme en France en 2012).

L’exception en question, c’est Mondial Assistance, qui possède depuis toujours ses propres équipes commerciales et marketing. « Nous ne travaillons pas avec les courtiers spécialisés dans le tourisme, qui sont des concurrents directs pour nous, explique Céline Chopin, directrice commerciale du marché Voyages/Loisirs/Mobilité chez l’assisteur. En revanche, nous faisons appel au courtage apporteur d’affaires (non spécialiste, Ndlr), canal par lequel est par exemple passé notre contrat avec Disney, renouvelé l’an dernier. »

Preuve supplémentaire, s’il en fallait, que les courtiers ont encore un avenir dans le tourisme, de nouveaux spécialistes font progressivement leur trou aux côtés des trois leaders du secteur (Présence, April et Chaubet) : Chapka, mais aussi Axelliance Risk ou Valeurs Assurances, tandis que l’espagnol Intermundial a discrètement ouvert un bureau en France en novembre dernier. Avec moins de 10 millions d’euros de primes émises par an, ces acteurs restent des« petits », mais ils ont trouvé les voies étroites de la croissance. « Nous avons misé sur les outils technologiques, les marchés de niche et tous ces nouveaux intermédiaires en ligne qui sont en train d’arriver », explique par exemple Geoffroy Bonnet-Eymard, chez Chapka. Lui annonce même une croissance de 70 % de son CA sur l’exercice en cours (clos fin juin) et, à rebours du secteur, une « augmentation de ses niveaux de commissions ».

TROUVER DE NOUVEAUX RELAIS DE CROISSANCE

Pour maintenir leurs positions, les majors cherchent quant à eux de nouveaux relais de développement, à commencer par de nouveaux assureurs avec lesquels travailler. Chaubet s’est ainsi rapproché du japonais Tokyo Marine, tandis qu’April s’est positionné en fer de lance du développement d’Ace Europe. « Il y a encore deux ans, on faisait 70 % de notre chiffre d’affaires avec Europ Assistance, explique Matthieu Drouet. Aujourd’hui, nous n’avons plus avec eux que le contrat AS Voyages, ils ont liquidé tout le reste. Donc nous devions nouer d’autres alliances. »

L’autre axe, c’est évidemment la diversification des activités vers de nouveaux marchés et la fabrication de produits packagés plus complets. C’est le pari de Présence, officiellement sorti du giron de Groupama en décembre dernier et qui a mis à profit sa liberté retrouvée pour réorganiser ses activités en trois pôles, tous rassemblés sous une marque ombrelle baptisée Groupe Présence. Aux côtés de Présence Assistance Tourisme, qui demeure la marque tourisme, Présence 24 Business Travel (lancé il y a trois ans) devient une société à part entière dédiée aux services aux voyageurs d’affaires, et Tess, jusqu’à présent séparée de Présence, complète le trio en tant que fournisseur de services aux entreprises du tourisme, telle que la gestion de l’après-vente ou la centralisation des paiements.

À la faveur de son changement de nom, l’ex-TMS devenu April International Voyages s’est quant à lui axé sur le développement de produits de santé-prévoyance, métier historique du groupe April, sa maison mère. Une dynamique de diversification dans laquelle Chaubet, sans surprise, a aussi décidé de s’engager. « Développer notre capacité à faire des propositions globales, intégrant les risques d’entreprise, la RC Pro ou la protection sociale, c’est notre feuille de route pour 2013 », confirme Stéphan Chaubet. Une stratégie qui s’accompagnera, comme chez TMS l’an dernier, d’un changement de nom, officiellement dévoilé début avril pour un déploiement commercial à partir du 1er octobre.

Le courtage spécialisé dans le tourisme a dû accepter des taux de commission globalement à la baisse l’an dernier.

« Les courtiers sont indispensables pour aller chercher de nouveaux clients », selon Christophe Jeanmet, chez Ace Europe.

Les majors cherchent de nouveaux relais de développement, à commencer par de nouveaux assureurs avec lesquels travailler.

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