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Pourquoi Air Austral a-t-elle des difficultés financières ?

Alors qu’un de ses B 787 est immobilisé depuis le 3 juin, pour au moins deux mois, Air Austral vient d’annoncer des pertes sur son dernier exercice annuel.

« L’Assemblée Générale tenue le jeudi 11 juillet 2019 a entériné les résultats du dernier exercice fiscal de la compagnie Air Austral, courant du 1er avril 2018 au 31 mars 2019. Un exercice marqué par un contexte économique complexe et des éléments géopolitiques et conjoncturels fortement pénalisants. » C’est par ces mots que la compagnie basée à La Réunion, détenue à 74 % par des actionnaires publics, a commenté ses résultats annuels. Après cinq années de résultats financiers positifs, l’entreprise annonce une perte d’exploitation de 2,7 millions d’euros, contre un bénéfice de 5,2 millions d’euros un an plus tôt. Pourtant, le chiffre d’affaires a progressé de 4,5%, à 394,44 millions d’euros, le trafic passagers de 2% tout comme le fret (9,3%).

« Étroitesse des marchés »

Alors comment expliquer ce passage à vide financier ? Fin mars, la chambre régionale des comptes de La Réunion a rendu une analyse économique sérieuse de l’entreprise. On y apprend qu’après une phase de redressement opérée entre 2012 et 2015 et concrétisée par le passage d’un déficit de –86,7 M€ à un bénéfice de 13,9 M€, la compagnie semble avoir redressé sa situation financière.

Mais l’excédent brut d’exploitation durant la période 2015-2018, après s’être maintenu autour de 16 M€, est en diminution lors du dernier exercice. Le résultat net est passé de 13,9 M€ à 0,3 M€ entre 2015 et 2018. Selon la chambre régionale, « la taille de la flotte, composée de neuf appareils, et l’étroitesse de ses marchés, exposent la compagnie aux fluctuations de la demande et aux risques financiers liés à l’exploitation des appareils ».

Beaucoup de concurrence

Les opérations de renouvellement et de renforcement de la flotte intervenues entre 2016 et 2017, nécessaires à la conduite de la stratégie de développement de la compagnie, expliquent aussi en partie l’évolution de la situation financière.

« Le développement de la concurrence et les conditions tarifaires proposées par les compagnies à bas coûts font peser des risques sur l’équilibre de l’exploitation et la rentabilité de la compagnie », ajoute la chambre régionale.

Le contexte a évolué avec l’arrivée de nouvelles compagnies desservant la métropole, qui génère 40% du trafic et les deux-tiers de son chiffre d’affaires d’Air Austral. Cinq compagnies se disputent désormais la desserte de la métropole en vol direct, Air Austral, Air France, Corsair, XL Airways et depuis 2017 French Bee. Fin 2018, bien qu’en recul de 10 points depuis 2012, Air Austral reste leader sur ce segment de trafic : elle détient 29,7% de parts de marché contre 28,4% pour Air France. Corsair voit sa position menacée par French Bee, qui devient fin 2018 le troisième opérateur avec 19,1% de parts de trafic passagers.

Le renforcement de la concurrence, qui a engendré un retrait de l’EBITDA estimé à 14 M€ entre les projections financières de 2012 et celles de 2017, risque d’impacter les exercices à venir.

L’alliance avec Air Madagascar coûte cher

Soutenue par ses actionnaires, Air Austral a choisi de s’allier avec la compagnie Air Madagascar pour accroître son rayonnement dans l’Océan indien. Mais pour atteindre cet objectif, Air Austral devra contribuer au redressement de la compagnie malgache. Le besoin de financement est estimé à plus de 35 M€.

Dans ce contexte, les enjeux de la compagnie réunionnaise sont multiples : consolider sa sécurité financière, alors que les effets de la crise de 2012 se font encore ressentir dans ses comptes ; accompagner le redressement et la croissance d’un partenaire indispensable à la réussite de sa stratégie de développement dans l’océan indien, vers la métropole et l’Asie et résister économiquement à l’arrivée sur le marché d’opérateurs aux modèles commerciaux concurrentiels.

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