Faillite de Thomas Cook : quelles sont les destinations les plus touchées ?

Au lendemain de l’annonce brutale de la faillite de Thomas Cook, l’onde de choc continuer de se propager dans l’industrie du tourisme. Si toutes n’ont pas encore communiqué de chiffres, les destinations revendues par le groupe commencent à estimer l’impact de cette faillite sur leur tourisme. Nombre de destinations “soleil”, fortement commercialisées par le TO, vont ainsi se trouver fortement impactées par cette situation. Une faillite dont les effets sont d’autant plus difficiles à prévoir qu’elle est d’une ampleur jamais connue dans l’histoire du tourisme.

Les regards se tournent notamment vers la Tunisie, destination convalescente qui avait enfin retrouvé les faveurs des TO après des années difficiles. Thomas Cook devait y organiser le séjour d’environ 100 000 clients, essentiellement britanniques, en 2019. 10 000 touristes clients du TO, dont 4500 Britanniques, s’y trouvaient lorsque la faillite a été annoncée. Une cellule de crise a été activée dès dimanche pour répondre aux inquiétudes des voyageurs, mais aussi à celles des hôteliers, qui en sont déjà pour leurs frais. Dans une interview relayée par RTBF, le patron d’un hôtel de Hammamet indique ainsi que 200 personnes ont réservé leur voyage avec Thomas Cook. Le voyagiste ne paie plus depuis 3 mois, rapporte l’article, ce qui représente le quart du chiffre d’affaires annuel de l’hôtelier. « Le bilan économique est beaucoup plus grave pour les hôtels impactés par la faillite de Thomas Cook que les conséquences des attentats de 2015”, s’alarme-t-il. 

D’après le ministère du Tourisme, Thomas Cook et ses filiales en faillite ont transporté 3,5% des touristes venus en Tunisie cette année. Ils ont organisé le séjour de 230.000 vacanciers, dont 107.000 via la maison mère Thomas Cook
UK, alors que la fréquentation a passé le barre des 7 millions depuis le 1er janvier, a précisé le ministre, René Trabelsi. Les réservations annulées pour l’arrière-saison représentent environ 30 à 40.000 séjours, a-t-il ajouté. « Cette faillite ne frappera pas le tourisme tunisien mais elle frappera certains hôteliers » qui faisaient une large part de leur chiffre d’affaires
via le voyagiste britannique, a estimé M. Trabelsi. Le voyagiste a fait faillite avant d’avoir réglé les factures pour la haute
saison estivale, laissant plus de 60 millions d’euros d’impayés selon les premières estimations de la Fédération tunisienne de l’hôtellerie. La FTH a appelé l’Etat tunisien à soutenir les hôtels touchés par des crédits d’impôts et autres facilités. Une caisse de compensation britannique doit prendre en charge les nuitées des touristes concernés à partir de la date de la faillite. Mais les factures des périodes précédentes devront être réclamées par des démarches auprès de l’administrateur judiciaire, a précisé l’ambassadrice britannique lors d’une conférence de presse à Tunis.

« A l’échelle du pays, les recettes touristiques tunisiennes ont dépassé celles de 2010 (année de référence avant la révolution, NDLR), les pertes engendrées ne vont pas affecter ces performances », a déclaré à l’AFP le
président de la Fédération tunisienne de l’hôtellerie, Khaled Fakhfakh. La faillite touche de plein fouet une quarantaine d’hôtels a-t-il ajouté, tout en estimant « ce sont des hôtels de qualité, je ne pense pas qu’il y ait de faillite ».

La principale agence tunisienne de services touristiques, qui transportait les clients de Thomas Cook, se retrouve elle aussi dans la tourmente, rapporte mercredi matin l’AFP.

Au Maroc, une cellule de crise a également été mise en place pour encadrer le rapatriement de milliers de clients du TO. Selon la presse locale, les deux pôles touristiques du pays, Marrakech et Agadir, qui à eux seuls totalisent la moitié des nuitées du pays, devraient être les plus touchés par la faillite du voyagiste.

Des pertes qui se chiffreront en millions

En Espagne, la faillite de Thomas Cook sera aussi un coup dur, notamment aux Canaries, où Thomas Cook est le deuxième TO en nombre de touristes dans l’archipel, selon l’association hôtelière des Canaries FEHT, qui précise qu’environ 35000 touristes sont affectés dans l’archipel par la faillite de Thomas Cook. Aux Baléares, « les pertes provoquées par cette faillite se chiffreront en millions », en prenant en compte l’impact sur le transport, la restauration et le commerce, a déploré dans un communiqué la fédération des petites et moyennes entreprises PIMEM. Thomas Cook a été « l’une des premières entreprises à avoir amené le tourisme aux Baléares. Elle laisse un grand vide dans le secteur, difficile à combler », a ajouté cette fédération.  L’organisation patronale nationale de l’hôtellerie CEHAT a quant à elle fait part de « sa préoccupation pour la situation dans laquelle [la faillite de Thomas Cook] laissera les destinations de vacances espagnoles, en particulier aux Canaries ». L’association demande au gouvernement des mesures pour aider le secteur, notamment des allègements d’impôts et de cotisations sociales. La ministre espagnole du Tourisme doit rencontrer mardi les représentants des professionnels et des régions affectées par la faillite du voyagiste. Selon le cabinet de consultants Mabrian, basé aux Baléares et spécialisé dans le tourisme, 745000 sièges d’avion étaient réservées via Thomas Cook pour les Canaries de septembre 2019 à août 2020, et 354000 pour les Baléares. Les Britanniques sont les touristes étrangers les plus nombreux en Espagne, avec 10,5 millions de visiteurs au premier semestre, suivis par les Allemands et les Français, selon des statistiques officielles espagnoles.

« Un tremblement de terre de magnitude 7 »

Autre destination très vendue par le TO, la Grèce est aussi en état d’alerte. 50000 clients du TO s’y trouvaient en vacances, dont 22000 en Crète. Le rapatriement des touristes étrangers a commencé, a précisé le ministre du Tourisme, Haris Theocharis. Un centre opérationnel a été mis en place au ministère pour gérer toutes les questions de rapatriement et 15 premiers avions sont arrivés sur les îles de Zakynthos, Corfou et Kos, a-t-il détaillé. “La nouvelle de la faillite de Thomas Cook est un tremblement de terre de magnitude 7 pour la Crète, a pour sa part déclaré à CNN Michalis Vlatakis, président de l’Association des agences de voyages et de tourisme de Crète. “Nous nous préparons à affronter le tsunami », a-t-il ajouté. « Des mesures concrètes doivent être planifiées et annoncées pour résorber les problèmes rencontrés par les entreprises touristiques à la suite de l’effondrement », a déclaré l’Association des agences de voyages et de tourisme de Crète dans un communiqué, ajoutant que le secteur privé « devait rester calme et apporter son aide à les milliers de touristes de Thomas Cook actuellement dans le pays ». « Notre comportement et le traitement réservé à ces personnes façonneront l’image de notre pays en tant que destination accueillante et responsable, au niveau international”, souligne Michalis Vlatakis. Manolis Tsakalakis, président de l’union des hôteliers de Rethymnon en Crète, estime de son côté dans une interview à l’ANA que la Crète va perdre entre 80 et 100 millions d’euros suite la faillite du tour-opérateur. « Nous sommes évidemment en contact avec d’autres ministères concernés pour que nous puissions soutenir toutes les entreprises qui sont exposées à la faillite et qui auront des difficultés financières dans un avenir proche, a indiqué le ministre du tourisme grec. Nous collaborons avec les ministères des Finances, du Développement et du Travail afin de pouvoir apporter notre soutien. » 

Des aides débloquées pour les professionnels

En Turquie, où se trouvaient 21000 clients du TO, le ministère du Tourisme a annoncé lundi qu’il mettrait en place “au plus vite” un programme de crédits pour venir en aide aux entreprises locales affectées par la faillite du voyagiste. Le ministre du Tourisme, Mehmet Nuri Ersoy, a précisé à la presse qu’environ 50 millions d’euros seraient débloqués dans le cadre de ce programme.

Le secteur du tourisme bulgare est lui aussi affecté. Thomas Cook est l’un des principaux TO avec lesquels la Bulgarie travaille. Le pays évoque lui aussi “un tsunami”, d’après les mots du directeur de l’institut bulgare d’analyses sur le tourisme, Roumen Draganov. Thomas Cook organise les vacances en Bulgarie d’environ 300.000 touristes britanniques et allemands par an. Le voyagiste exploite une cinquantaine d’hôtels sur le littoral de la Mer Noire. 

On sait aussi que Chypre sera aussi impactée : le groupe Thomas Cook pèse 4,1% du trafic annuel des aéroports chypriotes.

Article actualisé mercredi 25 septembre à 10h50.