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Reprise, attentats, perspectives… : le ministre du Tourisme tunisien fait le point

Il connaît les pros du tourisme mieux que personne : il en fait partie. Aux commandes du tourisme tunisien depuis novembre 2018, René Trabelsi fait le point sur la destination, alors que commence une saison déterminante.

L’Echo touristique : Vous avez à votre actif une longue expérience en tant que professionnel du tourisme, agent de voyage, TO, et broker. En quoi cela influence-t-il votre façon d’exercer vos fonctions ?

René Trabelsi : Ce qui m’aide après 22 ans de métier, c’est que je connais, les problèmes de la destination, et je sais comment fonctionne le secteur. Le tourisme, c’est comme la culture, il faut en connaître les rouages. La différence aussi, par rapport à une personnalité qui viendrait d’un autre domaine, c’est ma bonne relation avec la profession, que ce soit les hôteliers ou les agents de voyages tunisiens. J’ai une relation d’amitié avec eux, nous parlons beaucoup, il y a une confiance entre nous, et c’est profitable pour tous. Au lendemain de ma nomination, la première réunion qui a été organisée, c’était avec les professionnels tunisiens. Pas besoin de se présenter, de poser des questions : nous sommes rentrés tout de suite dans le vif du sujet. J’ai aussi immédiatement fait une visite en France – c’était ma première visite officielle – pour rencontrer les professionnels français. Là aussi, ce sont des gens que je connais, ce sont des amis, alors le message passe mieux parce qu’on sait de quoi on parle. Et mon message c’était : il faut remettre la machine en marche. La Tunisie est un pays proche, on y parle français et il y a un rapport qualité-prix que personne ne peut proposer en Europe… c’est dommage de ne pas être la destination numéro un pour les Français.

La Tunisie a été frappée par un double attentat le 27 juin, qui visait les forces de police. Quelle a été la réaction des professionnels français suite à ces événements ?

J’ai immédiatement reçu des SMS de sympathie de pratiquement tous les TO français. De sympathie, avec la volonté de pousser la destination en dépit de ces attentats. De notre côté, au ministère, nous avons immédiatement mis en place une cellule qui était en relation avec tous les TO, les agences de voyages et les hôtels en Tunisie, pour relever des annulations ou des demandes de retour anticipé des touristes. C’est peut-être un peu tôt (l’interview a été réalisée le 5 juillet, ndlr) mais pour le moment, nous n’avons aucun retour de demandes d’annulation ou de report. Il n’y a pas eu de vent de panique suite à ces attentats qui, je le rappelle, n’ont pas ciblé les touristes. Ils étaient vraiment dirigés sur la police, sur ce symbole de la police tunisienne, puisque tout le monde sait que la police mène une vie très dure à ces terroristes.

C’est la première fois que vous êtes confronté à ce type d’événement dans le cadre de vos fonctions…

Oui, et justement, j’ai vécu ça en tant que tour-opérateur. Surtout en 2015, où il y a eu trois attentats très importants en Tunisie. J’ai toujours critiqué la manière dont la Tunisie a géré ces situations. Se cacher, c’est une faute. Ne rien dire aussi.  C’est pour cette raison que quand Jean-Pierre Elkabbach m’a proposé de venir en parler dans sa matinale, j’ai dit oui. J’ai pris un avion à deux heures du matin et j’y suis allé. Ce n’est pas un exercice facile, mais je pense que ça a été très bénéfique. Oui il y a eu des attentats, oui nous sommes comme tout le monde, on affronte, et on montre notre visage. Je pense que c’est une technique gagnante parce que les médias ont besoin d’une vérité, d’une sincérité, et surtout que la responsabilité soit assumée. J’ai pris un risque, mais je pense que le résultat a été payant. Tous mes amis professionnels français m’ont dit que j’avais réussi ma mission parce que j’avais parlé comme un professionnel, pas comme un politique.

Depuis plusieurs mois, la Tunisie fait en tout cas son retour sur le marché français, sans toutefois atteindre les performances de 2010, et ses 1,4 million de touristes français. Quand espérez-vous y parvenir ?

Nous observons effectivement le retour de la confiance. Beaucoup de TO m’ont dit qu’ils avaient augmenté leurs capacités de presque 30% sur la Tunisie. On sait que beaucoup d’entreprises de tourisme veulent limiter les risques, surtout sur certaines destinations, mais cette année, j’ai senti qu’ils ont joué le jeu avec la Tunisie. Le retour des grands clubs le prouve. L’objectif qui a été fixé en novembre dernier, c’est d’accueillir au total 9 millions de touristes. Un million de touristes français, c’est très bien pour 2019, mais je pense que pour 2020, le marché français sera largement numéro un sur la destination et nous devrions atteindre ces 1,4 million, grâce aux ouvertures des hôtels encore fermés et aux engagements pris par les TO français ou européens. Ils ont commencé à négocier pour 2020 et 2021, avec des capacités énormes par rapport à cette année, parfois la totalité de l’hôtel.

La Tunisie attire ces dernières années des touristes en provenance de nouveaux marchés. Quels sont les pays désormais ciblés ?

Oui, le marché russe par exemple est aujourd’hui notre deuxième marché après la France. C’est un marché qui n’existait pas du tout en Tunisie. Ils ont fini à 650 000 en 2018, ils sont à 725 000 prévus en sièges réservés sur la Tunisie en 2019 en sachant que pour 2020, ils nous ont assuré qu’ils misent sur un million de touristes russes. C’est une progression énorme.

Il y a la place pour tout le monde, en termes de capacités hôtelières ?

Il y a de la place, c’est sûr qu’ils prennent aujourd’hui la place des autres, qui n’ont pas réagi encore pleinement, comme le marché français, ou le marché allemand. C’est ce que je dis aux professionnels français : revenez, parce que les places vont être prises et ça risque d’être cher. L’autre marché qui progresse très bien en Tunisie, c’est le marché chinois.

 

Retrouvez un focus sur la Tunisie et des extraits inédits de cette interview dans le numéro d’octobre de L’Echo touristique.

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