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[Tribune] Faut-il se réjouir du retour des touristes chinois ?

L’Europe – et la France en particulier – sont une destination très prisée des touristes chinois, et leur contribution économique est cruciale. Pour autant comment préparer dans les meilleures conditions leur retour, après trois ans d’absence ? Philippine van Tichelen, managing director de Here, partage sa vision.

Depuis le 8 janvier, les touristes chinois peuvent de nouveau voyager. Cette nouvelle a immédiatement fait l’objet de réactions extrêmes, entre des professionnels du tourisme plutôt enthousiastes à l’idée de revoir cette clientèle cruciale pour les recettes touristiques, et des autorités gouvernementales plus frileuses face au risque d’une nouvelle vague de Covid-19, alors que le virus flambe à nouveau dans l’Empire du Milieu. Sans oublier des réactions parfois ouvertement racistes à l’égard des voyageurs chinois précédés par leur réputation de tourisme de masse et peu respectueux des écosystèmes humain et naturel locaux.

Commençons par remettre un peu de rationalité dans le débat. L’afflux massif de touristes chinois en France n’est sûrement pas pour demain. La décision d’imposer des tests à l’arrivée en France et dans d’autres pays d’Europe vont réfréner plus d’un voyageur chinois, légitimement épuisés par trois années de contraintes considérables dans leur quotidien. Une part importante des voyageurs chinois a en outre besoin de renouveler passeport et visa avant de reprendre l’avion, tandis que l’offre de vols internationaux est actuellement à 8% de son niveau pré-Covid et aura besoin de plusieurs semaines voire plusieurs mois pour se réajuster au redémarrage de la demande.

Par ailleurs, l’Asie du Sud-Est reste de loin la première destination de vacances des Chinois, surtout à cette période du Nouvel An chinois. Le Japon, la Thaïlande et la Corée du Sud formaient d’ailleurs le top 3 des recherches au lendemain de l’annonce de réouverture des frontières sur les deux plateformes Qunar et Ctrip.

Mais surtout, n’oublions pas que la classe moyenne chinoise a été lourdement impactée par la crise économique générée par la politique zéro-Covid du pays et n’est pas prête de dépenser son épargne restante dans des vacances long-courrier. Pas de raz de marée de touristes chinois à court terme donc, mais un retour inéluctable à moyen terme, que tous les acteurs du tourisme ont donc le temps de soigneusement préparer pour n’en garder que les externalités positives.

Une contribution économique cruciale

L’Europe – et la France en particulier – sont en effet une destination très prisée des touristes chinois, pour qui des vacances en Europe endossent un rôle statutaire, en étant le symbole de leur réussite sociale. Ils dépensent presque sans compter et ont ainsi généré à eux seuls 3,5 Mds € de recettes en 2019 en France, pour 2,2 millions de visiteurs. Soit moins de 3% des visites en volume mais +11% des recettes en valeur. Leur contribution économique est donc absolument cruciale pour la filière..

Pour autant, ils ont mauvaise presse. Les attentes des touristes chinois sont en effet très différentes des touristes européens : voyages en groupe, sur des sentiers battus et rebattus, approche tick-the-box (ou plutôt « take-the-pick ») avec la visite successive, quasi-industrielle des principaux monuments et sites touristiques, peu d’interactions avec les locaux… Ce profil à peine caricatural du touriste chinois n’est en fait pas sans rappeler le touriste français ou européen, au moment de la démocratisation du voyage long-courrier et de la langue anglaise dans les années 70-80. Evitons donc d’avoir la mémoire courte !

Il n’est évidemment pas question d’offrir aux touristes chinois un traitement différent de celui réservé à tous les autres, pour des considérations évidentes d’égalité et de liberté. La France, première destination touristique du monde, se doit d’être exemplaire dans la façon dont elle accueille les touristes, quel que soit leur pays d’origine.

En creux, la question du surtourisme

Ce n’est en fait pas le retour des touristes chinois qui pose problème, c’est plutôt le risque d’un retour aux écueils pré-Covid de flux touristiques non régulés et des ravages du tourisme de masse, dont les effets sont délétères pour toutes les parties prenantes, et que cristallise la perspective du retour des touristes chinois.

L’industrie touristique française a cependant l’opportunité de mettre en place des garde-fous contre le surtourisme, à condition que chaque acteur prennent ses responsabilités : les compagnies aériennes avec un nombre raisonnable de liaisons aériennes, les agences de voyages et les tour-opérateurs avec des produits diversifiés et répartis sur toute l’année. Les collectivités locales avec l’interdiction des autocars en centre-ville, les sites touristiques avec la mise en place de quotas journaliers.

Sans oublier l’engagement de chaque voyageur à respecter le pays qui l’accueille et à ne pas laisser aux portes de l’avion toute éthique de responsabilité.

Philippine van Tichelen, directrice générale de Here

1 commentaire
  1. Anonyme dit

    Merci pour cet article, j’aimerais juste vérifier si ce Mme Philippe van Tichelen connaît ou pas les conditions de visas distribués aux touristes chinois qui viennent de la Chine continentale. J’imagine non. Parce que si oui, il n’aurait jamais pu juger les activités collectives des touristes chinois. Pour moi, ce bel article nous dit: il faut faire venir les Chinois(es) en gagnant leur argent, mais il nous faut les juger comme mauvais contre les cultures sociales et les conditions naturelles locales. Quel beau point de vue! Bravo! Here

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