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Figure de STYLE

On peut littéralement vivre de l'air du temps. C'est un métier réservé à une poignée d'élus dont fait partie Vincent Grégoire, chasseur de tendances spécialisé dans l'art de vivre, au sein du bureau de style Nelly Rodi.

Le radar toujours sur « On ». Au point de se réveiller la nuit pour griffonner des idées sur des petits bouts de papiers – rangés dans une boîte signée Starck – et de nourrir sa curiosité partout, tout le temps, face aux chefs-d'oeuvre d'un musée comme dans les rayons d'un supermarché. Les tendances, Vincent Grégoire les chasse, les traque, sans doute les crée-t-il aussi au sein du bureau de style de Nelly Rodi, dont il dirige le pôle Art de vivre depuis presque 25 ans. « Le métier de chasseur de tendances ou de tendanceur est perçu comme un truc un peu mystérieux, secret, de l'ordre de l'influenceur, explique Vincent Grégoire. C'est un raccourci qui est facile, mais il est vrai que définir ce métier est très complexe. Je fais à la fois un travail de sociologue, de décrypteur, d'analyste… C'est un métier qui est aux frontières du marketing, de la R&D et de la création. » Sa mission : conseiller les marques pour les aider à anticiper les évolutions des modes de vie et leur permettre de s'adapter. Il intervient notamment dans les secteurs du luxe, de la grande distribution ou encore de l'hôtellerie. « Je traite de réflexion stratégique, de plate-forme de marque, mais je m'éclate autant à faire des propositions d'évolutions de tendances, d'un nouveau goût, d'un nouveau mood ou à travailler sur de la scénographie, du merchandising, un film publicitaire… Ce qui m'intéresse, c'est d'entrer dans la tête de plein de gens différents. » Beaucoup de rencontres donc, et des interlocuteurs qui ont changé au fil des années. « Jusqu'il y a encore dix ans, nous étions en relation avec les équipes créatives, les stylistes, les designers, les équipes R&D. Nous avions plutôt le style ou la technique face à nous, se remémore Vincent Grégoire. Puis nous avons commencé à avoir les équipes achats, et aujourd'hui, ce sont souvent les équipes managériales, marketing ou communication. L'innovation est passée dans les mains du marketing ou de la com'. » Les temps changent, et c'est bien là son matérieau principal. Mais pas au point de développer une obsession de la nouveauté pour la nouveauté. Surtout quand il s'agit du dernier restaurant ou hôtel à la mode. « Je me méfie parce que je suis souvent déçu. Je fais partie de ces consommateurs – et cela revient souvent dans nos études – qui en ont ras-le-bol de cette surenchère de propositions, de ce papillonnage et des lieux survendus. » À la fin de l'interview, évoquant ses lectures, Vincent Grégoire sort À la recherche du temps perdu qui patiente dans son sac. Un antidote ?

Les attentes des voyageurs changent, les hôtels aussi. Le chasseur de tendances, Vincent Grégoire, s'est entretenu avec L'Écho touristique de quelques-uns des grands courants qui agitent le secteur. Morceaux choisis.

« Il faut remettre de l'étonnement »

#Étonnement. « Ces derniers temps, on a eu tendance à se fourvoyer dans des propositions très standardisées, dépersonnalisées. Pas seulement dans l'hôtellerie, dans toutes les villes on trouve les mêmes magasins par exemple. Au bout d'un moment, les gens ont besoin d'être étonnés à nouveau. Le problème, c'est qu'ils ne savent pas comment. Ça part dans toutes les directions, tout le monde fait une multiplicité de propositions. Ce que veulent les gens, c'est retrouver de la vie, de l'humanité, de la considération, du plaisir et de l'étonnement. Mais tout est devenu très froid. (…) Le retour de l'esprit bazar est une tendance très forte actuellement, que ce soit dans les boutiques, avec le Bazar d'Inès de la Fressange ou Bazar Therapy ou dans certaines nouvelles adresses, des lieux qui revendiquent un esprit un peu bohême, foutraque, élégant, dandy. »

#Relocalisation. « Nous assistons à une relocalisation des concepts. Quand on va dans un hôtel parisien, on veut retrouver du French cool, du new-yorkais à New York. On sent une volonté de revenir à des codes historiques, stylistiques, gustatifs, dans toute l'offre produit, dans le mix, qui est un hommage à l'endroit où ça se trouve. »

#Fondamentaux. « On ne va plus dans certains établissements pour dormir ou manger, mais pour « vivre une expérience ». Ça suffit ! Nous ne sommes pas des rats de laboratoire ! La première expérience dans l'hôtellerie, c'est quand même de bien dormir. Remettre la chambre au coeur des préoccupations est une tendance qui revient fortement. Il faut savoir surprendre, mais il faut aussi revenir aux fondamentaux de l'hôtellerie, le gîte et le couvert. »

« Les gens ont besoin qu'on leur raconte une histoire »

#Storytelling. « Tout va trop vite. Avec le digital, les gens peuvent avoir accès à tout. On a le monde dans sa poche. Peut-être qu'un ancien monde, avec une histoire, rassure. Les gens ont besoin qu'on leur raconte des histoires avec des petites attentions, des partis pris. Pas des histoires intimidantes, des histoires dont ils peuvent être partie prenante, avec lesquelles ils peuvent jouer. Il y a cette idée de remettre du storytelling, de l'engagement de la part du consommateur. »

#Incarnation. « L'hyper personnalisation, c'est aussi un moyen pour les hôtels de se distinguer. Je crois sincèrement que l'on est en train de revenir à un esprit façon Château Marmont (à Los Angeles, Ndlr), un lieu incarné par un curateur. Il y a quelqu'un qui est propriétaire de l'hôtel, qui imprime sa patte, une vision, un projet. Après, on aime ou on n'aime pas sa proposition, mais aujourd'hui, ce que veulent les consommateurs, c'est faire « whaou ou beurk ». Ils veulent qu'on provoque leur réaction, être entraînés dans une aventure. »

#Manifeste. « La dernière fois que j'ai fait à la fois « beurk et whaou », c'était avec Matali Crasset et le Hi Matic notamment. Il y avait un vrai parti pris. Pour des raisons économiques, c'était risqué (l'hôtel a fermé depuis, Ndlr) mais c'était particulier. C'était un manifeste. »

« Les clients haut de gamme veulent retrouver un certain entre-soi »

#Multi. « Il faut se reconnecter avec les multicibles. Les segments de marché sont très chahutés. Parce que même quelqu'un qui n'a pas de gros moyens va appréhender l'univers hôtelier haut de gamme, pour un voyage de noces, un événement… À l'inverse, quelqu'un qui a beaucoup d'argent n'a plus honte de descendre dans un hôtel entrée de gamme quand il y a du confort, des services. (…) Il y a cette notion très ancrée de Value for money, de « bon plan » qui prend de plus en plus d'importance. (…) On assiste aussi à une remise en question de la notion de luxe, parce que ça manque de sincérité, d'humanité. Et la clientèle haut de gamme aspire à autre chose. À ce qu'on la chouchoute, mais sincèrement. Sans être réduite à un portefeuille sur pattes !

#Communauté. Avant les voyages étaient réservés aux gens qui avaient de l'argent. Aujourd'hui, tout le monde voyage. Et maintenant l'élite, ou ceux qui s'autoproclament « élite », ont envie de retrouver un certain entre-soi. Ce qu'ils veulent, c'est être reçus chez quelqu'un à New York qui a un penthouse de 400 m2, une sorte de Airbnb de luxe… Une partie de cette clientèle aspire à cela parce que les hôtels sont devenus consensuels, trop accessibles, ça les gêne, même si ça peut faire grincer des dents. (…) Dans les hôtels, il manque souvent quelque chose qui rassemble, ou qui exclut, mais qui soit assez radical. Il y a par exemple à Marrakech un hôtel, The Source, dédié à la musique. On peut y répéter, faire des boeufs, enregistrer… Les gens y retrouvent leurs codes, leurs tribus et y partagent la même passion. Il faut remettre de la passion dans l'hôtellerie.

#Collectif. « L'hôtel doit devenir un endroit de rencontres, d'échange. Ça peut être lourd à mettre en place parce que pour le faire vivre, il faut être imaginatif, débrouillard, mais ce n'est pas toujours une question d'argent. »

« Le digital est un outil pour apporter de la vie »

#Digital. « Il faut remettre du Web, du digital. Cela ne veut pas dire mettre du wifi partout. Mais arrêter d'avoir peur de tous ces éléments. On peut recourir au digital pour faire découvrir un lieu ou comme le prolongement de ce qui se passe dans l'hôtel. Et se servir de tout ce que le digital peut nous apporter pour créer du rythme, des espaces, de l'hologramme, de la réalité augmentée, de la projection, des images, des expériences, de la vie. Il y a par exemple en Austral

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