Eric Thomas, Turquoise TO : « Nous sommes totalement tournés vers 2022 »

L’Echo touristique : Comment Turquoise TO traverse la crise que nous vivons actuellement ?

Eric Thomas : De façon résiliente. Quand on prend du recul, on se rend compte que cette situation commence à s’éterniser… mais les semaines et les mois se succèdent, et nous essayons de demeurer exemplaire pour nos clients, et de faire en sorte que nos équipes gardent la motivation. Ça n’est pas toujours facile. L’année 2020 a été compliquée, et cela se traduit par une baisse de 50% de notre chiffre d’affaires par rapport à 2019 (soit 4 millions d’euros, NDLR). Ce qui n’est pas une performance si mauvaise, car nous restions sur trois années de croissance historique. Nous avons donc puisé dans les réserves accumulées pendant cette période pour gérer du mieux qu’on pouvait cette crise inédite.

Avec une rupture d’activité ?

Eric Thomas : Non, car nous avions pour mot d’ordre de toujours rester ouvert. Nous avons un peu réduit nos horaires, et nous devons gérer les ressources humaines de façon millimétrée, mais tous nos salariés travaillent actuellement. C’est important pour maintenir leur motivation, et c’est important pour nos partenaires en agence de voyages de savoir qu’ils peuvent nous joindre de 10h à 16h, par téléphone, ou par mail, sur notre standard. Cela nous a permis d’apporter un support conséquent, je crois, pour aider les agences à mieux gérer la situation de leurs clients. Et puis, nous avons vite compris, en voyant l’évolution de la situation sanitaire cet hiver, que le premier semestre de l’année 2021, le plus important – car hivernal – pour un tour-opérateur comme le nôtre, serait très compliqué. Ça n’était pas facile de faire une croix sur notre année si tôt dans la saison, mais ça nous a permis de nous projeter sur l’automne 2021 et 2022 très tôt.

Vous pensez déjà à 2022 ?

Eric Thomas : Nous sommes même totalement tournés vers 2022. Nous espérons pouvoir travailler à peu près normalement à l’automne 2021, mais 2022 sera l’année de la reprise. Notre équipe de production est concentrée sur l’année prochaine, et enrichit notre catalogue toutes les semaines. Nous avons également profité de cette pause forcée pour développer de nouveaux outils technologiques pour nos partenaires agents de voyages, comme nous l’avons toujours fait. Cet été, nous leur proposerons un carnet de voyages digital en marque blanche, qu’ils pourront directement transmettre à leurs clients. C’est l’un de nos gros développements en cours. Nous avons également connecté notre outil à de nouvelles bases de données, comme Amadeus Hôtels par exemple. D’ici cet été, nous aurons également la V3 de notre deviseur, qui permettra désormais d’accéder à un stock aérien et hôtelier dans de nombreuses destinations, et de construire en quelques clics des combinés inter-îles élaborés.

Turquoise TO reste toujours concentré sur les îles ?

Eric Thomas : La question de s’ouvrir à d’autres destinations se pose à tous les voyagistes. Nous y avons réfléchi et nous préférons miser sur nos forces, celles qui ont fait notre succès avant la pandémie. Nous voulons retrouver notre croissance et notre dynamisme, d’autant plus que le contexte concurrentiel nous paraît plus favorable, vu les mouvements observés dans l’industrie, dans les tour-opérateurs de notre catégorie. Donc nous poursuivons notre stratégie. Tous nos investissements sont tournés vers le B2B et les 2000 agences de voyages inscrites dans notre fichier. Bien sûr, le tourisme évolue, et a besoin d’agilité, et nous saurons activer d’autres leviers, comme le B2C, si cela s’avère nécessaire. Mais ce n’est pas notre volonté. D’autant plus qu’il reste beaucoup à faire dans les îles, et en B2B.

La marque No Shoes No News, que vous vous apprêtez à lancer, n’est-elle pas destinée à incarner cette possible diversification ?

Eric Thomas : No Shoes No News était, jusqu’ici, une gamme de produits de notre brochure généraliste qui réunissait hôtels de charme, hébergements insolites et autres boutique hôtels. Ce sont des produits qui nous tiennent à cœur, et qui s’inscrivent très souvent dans les tendances qui agitent le tourisme actuellement. Nous avons donc décidé, l’été dernier, d’en faire une marque à part entière, et de relever le niveau d’exigence de notre sélection de fournisseurs, pour en faire une marque engagée pour un autre tourisme. No Shoes No News proposera donc des établissements menant une politique de tourisme durable, des excursions respectueuses de l’environnement, des restaurants qui utilisent les produits locaux… C’est une marque qui va permettre de mettre du sens dans ce que nous vendons. Nous sommes curieux de voir la réaction de la distribution, et si les agences de voyages sauront s’approprier cette nouvelle marque, qui va mettre du sens dans ce que nous vendons. Et qui concrétise un peu plus la démarche durable dans laquelle nous voulons nous inscrire.

D’autres projets durables sont engagés ?

Eric Thomas : Nous avons toujours été sensible au fait de promouvoir une certaine façon de voyager. Nous nous sommes par exemple rapprochés d’ATR, et nous souhaitons, à terme, décrocher le label de l’association. Nous sommes déjà en contact avec nos correspondants, à destination, pour leur expliquer le nouveau cahier des charges, plus exigeant, de Turquoise TO, sur toutes ces sujets-là. Nous sommes également en train de sélectionner des projets associatifs, à destination, que nous soutiendrons (reforestation à Madagascar, sauvegarde du corail à l’Île Maurice…). Nous allons certainement intégrer ces projets à nos challenges de vente de la rentrée, pour sensibiliser nos partenaires de la distribution à notre démarche. Peut-être que leur clientèle y sera sensible également. Nous avons cette volonté de nous impliquer pleinement dans les projets qu’on soutient, et d’y associer les agents de voyages. C’est quelque chose que nous avons toujours fait, mais si nous n’en avons jamais trop parlé. C’est l’orientation et le sens que l’on souhaite donner à Turquoise TO.

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