Cap-Vert : une niche pour passer l’hiver

La chanteuse du Cap-Vert Cesaria Évora a beau donner de la voix, son pays reste discret et méconnu. Constitué de dix îles, au large des côtes sénégalaises, l’archipel semble pourtant revenir lentement sur le devant de la scène touristique depuis quelques mois. La destination a déjà connu par le passé les honneurs de certains TO poids lourds, à commencer par Nouvelles Frontières, qui s’y est lancé en 2006 en déclinant son modèle industriel habituel : vol affrété sur Corsairfly (la compagnie maison) et hôtel-club sur place (Paladien Riu Fontana, sur l’île de Sal). Mais les vols ont été arrêtés à la fin du printemps 2008. Et aucun autre TO n’a osé reprendre le flambeau. C’est Look qui, finalement, a décidé de relancer une production de séjours en club au printemps dernier. En avril, le TO a ainsi ouvert un Lookéa dans les locaux du Riu Karamboa, un hôtel 5* construit sur l’île de Boa Vista, et relancé une chaîne de vols charters, qu’il reconduit du 17 décembre au 29 avril 2010. Et il semble que ce retour d’un major du tour-operating a servi de déclic pour d’autres voyagistes. Top of Travel, qui avait mis de côté l’archipel depuis l’arrêt des vols de Corsairfly, a ainsi pris des engagements sur le charter de Look (30 sièges par semaine cet hiver) et propose des séjours balnéaires dans le même hôtel.

UN TRAVAIL DE FOND

« C’est une reprise tranquille, explique toutefois Séverine Durmaz, responsable marketing de Top. Notre programmation sera plus réduite cet hiver que l’an dernier, mais nous devrions l’étoffer l’année prochaine. » Mais le coup de force le plus spectaculaire est signé Héliades. Le spécialiste de la Grèce fait le pari de devenir cet hiver le leader sur la destination et il y met les moyens : vol hebdomadaire affrété en totalité sur XL, la compagnie du groupe, et ouverture d’un Club Olympien au sein du Riu Fontana, hôtel dans lequel NF avait installé son Paladien et qu’Héliades commercialise désormais en exclusivité sur le marché français. Objectif : 5 000 clients d’ici le printemps. Mais les débuts sont plus laborieux que prévus. « Les ventes ont démarré lentement et tardivement et nous avons dû revoir nos prix à la baisse, reconnaît Jean Brajon, le DG d’Héliades. Notre prix d’appel à 949 E pour un forfait vols et séjour d’une semaine en tout compris s’est révélé trop haut pour le marché, et nous tournons désormais plutôt autour de 850 E. » La fin de saison se présente mieux. « Nous avons déjà un matelas confortable sur les mois de janvier à avril, ce qui devrait nous permettre de ne pas casser les prix », poursuit-il, tout en annonçant qu’aucun vol ne sera annulé. Le TO poursuivra-t-il l’été prochain ? Sans doute pas. De l’avis général, le Cap-Vert est surtout une destination d’hiver. « C’est un pays qui nous permet de rétablir un certain équilibre entre les saisons d’été et d’hiver », confirme Séverine Durmaz. « À partir d’avril, les destinations moyen-courriers de Méditerranée s’ouvrent et le Cap-Vert n’est plus compétitif en terme de prix », ajoute Jean Brajon. Chez Look, pourtant, on assure que l’archipel « a très bien marché cet été », dixit Patrice Caradec, son PDG. Reste que le Cap-Vert est une niche. Les gros TO se concentrent sur les séjours balnéaires, mais l’offre de circuits et de combinés inter-îles est encore peu développée. Un créneau sur lequel Autre Mer, spécialiste de l’archipel depuis 1997, reste le principal producteur. Voilà, sans doute, pourquoi le petit voyagiste ne voit pas d’un mauvais oeil le retour de la concurrence, qui a le mérite de faire parler de l’archipel.