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La (mauvaise) place des femmes dans l’entreprise

Femmes, on vous aime sauf quand il s'agit de vous confier des postes à responsabilités ! Le monde du tourisme ne fait pas exception à la règle même si les choses changent doucement à l'initiative des grandes entreprises.

On connaît la mauvaise place faite aux femmes dans le monde du travail en France. L'Observatoire des inégalités livre quelques indicateurs plus parlants que de grands discours. En 2011, le taux de chômage féminin était de 9,7% contre 8% pour les hommes, le travail à temps partiel concernait 8% des femmes et 2,8% des hommes. Tous temps de travail confondus, les femmes touchaient au total un salaire 24,5% moins élevé que celui des hommes ou, dit autrement, les hommes gagnaient 31% de plus que les femmes. À ces données professionnelles, on peut en ajouter une autre qui noircit encore le tableau : le temps journalier consacré aux tâches domestiques entérine l'inégalité femmes-hommes avec 2 h24 pour ces messieurs et 3 h52 pour leurs compagnes.

Le secteur du tourisme ne fait pas exception. Il suffit de comparer le taux de féminisation, de l'ordre de 85 à 90% dans les BTS tourisme, et de 77% dans les agences et le peu de représentation des femmes dans les états-majors ou à la tribune des congrès. Les costumes cravates ont le pouvoir et le partagent peu.

Le plus récent Contrat d'études prospectives de la branche des professionnels du voyage, publié en 2011 par le SNAV, le confirme : 77% des salariés sont des femmes. Sachant que plus de la moitié des recrutements porte sur des postes de conseillers voyages, avec dans près de 70% des cas un profil BTS. La ventilation des effectifs de la branche par grande CS (catégorie sociale) pointe des inégalités face à l'ascenseur social : 30% des hommes sont présents dans la catégorie sociale «cadres et chefs d'entreprises salariés», contre seulement 13% pour les femmes. Ces dernières forment l'essentiel des contingents «employés» (à 56%), contre 35% pour les hommes. En revanche, garçons et filles sont presque à parité dans la CS «professions intermédiaires» (à hauteur de 30% et de 29% respectivement).

Peu d'évolution de carrière
Par ailleurs, le faible potentiel d'évolution de carrière se traduit par des sorties prématurées du secteur, qui explique en partie la pyramide d'âge jeune (un tiers de moins de 30 ans, et 45% de 30-45 ans) ainsi que le turn-over. Pourtant, «il y a autant de femmes que d'hommes qui veulent devenir chef d'entreprise mais au final, seules 30% d'entre elles passent à l'acte», a déclaré au journal Les Échos, Laurence Piganeau, juriste et responsable éditoriale du site Internet de l'APCE (Agence pour la création d'entreprises). D'après une récente étude Oxatis-KPMG, 35% des dirigeants de sites marchands de TPE/PME sont des patronnes. Mais pas sûr que ce pourcentage se vérifie dans le tourisme.

Sur les 50 premières entreprises de tour-opérating classées dans le palmarès financier annuel de L'Écho touristique, seules quatre sont dirigées par des femmes (Pierre et Vacances, Le Cercle des Vacances, Beachcomber Tours et Maison de la Chine). Quelques directrices générales adjointes ou déléguées (Chez Voyageurs du Monde, Plein Vent ou Top of Travel) rehaussent la piètre performance mais au global sur 100 entreprises, on retrouve le taux national de 7 à 10% de femmes dans les instances dirigeantes. Et c'est vrai y compris quand on parle de distribution (à l'exception d'Isabelle Cordier et d'Adriana Minchella) et de nouvelles technologies. Au sein du CTT (Club tourisme et technologie), qui est un club d'échanges et de veille dans l'e-tourisme, seulement 6 des 50 membres appartiennent à la gent féminine…

L'influence des réseaux de femmes
Les choses sont néanmoins en train d'évoluer, doucement, dans le tourisme comme ailleurs. Le projet de loi sur l'égalité femmes-hommes, qui devrait être adopté par le Sénat au printemps, pose des jalons d'avenir. Mais si les mentalités ont la vie dure, c'est aussi aux femmes, elles-mêmes, de ne pas se limiter dans leurs ambitions. «Nous disons aux femmes, qui manquent de confiance en elles, ayez de l'audace ! Osez, osons, pourraient être notre devise», explique Agnès Gascoin, présidente de l'association Femmes du Tourisme, créée en 2005 par huit femmes ayant des postes à responsabilités et qui compte aujourd'hui 85 membres. Son objectif : défendre et valoriser la place de la femme dans le tourisme, encourager les carrières féminines en dépit des obstacles.

%%HORSTEXTE:1%%Vis-à-vis de l'extérieur aussi, Femmes du Tourisme gagne en audience. «Nous avons actuellement des discussions très avancées avec le ministère du Tourisme. Nous voudrions être placées sous son haut patronage, pour pouvoir nous en réclamer et avoir une reconnaissance supplémentaire pour faire passer nos messages. L'idée, c'est d'apporter notre pierre à l'édifice, en lien aussi avec le ministère du Droit des Femmes.

Cela nous donnerait une légitimité institutionnelle dont nous serions fières et dont nous pourrions user», poursuit Agnès Gascoin, qui croit également au pouvoir d'influence d'une association qui se singularise par sa transversalité. À la tête de la direction générale du groupe Pierre et Vacances Center Parcs depuis début 2013, Françoise Gri a fait le choix à travers son livre «Women Power» de s'adresser directement aux jeunes qui hésitent dans leurs orientations professionnelles et aux femmes qui font leurs premières armes. «Beaucoup de femmes s'autolimitent dans leurs ambitions. D'autres ne veulent pas rentrer dans une discrimination positive. Or la mixité est essentielle en entreprise», remarque-t-elle. Ce discours, Françoise Gri l'applique dans le quotidien du groupe qu'elle dirige. «Depuis mon arrivée, un nouveau processus de gestion des talents avec intégration de la mixité a été mis en place. Mais nous avons encore à progresser dans notre culture des ressources humaines», reconnaît-elle.

Les entreprises leaders ouvrent la voie
%%HORSTEXTE:3%%Un autre géant de l'hébergement, Accor, a déployé, il y a trois ans, une politique de diversité Groupe dans l'ensemble de ses comités de direction, concrétisée par une charte qui repose sur 10 engagements de non-discrimination et d'égalité de traitement pour l'ensemble des salariés.

L'hôtelier a été plus loin en 2012 en créant son propre réseau international de femmes : Women at Accor Generation, qui compte actuellement 1 734 membres dans le monde et qui a pour but de lutter contre les stéréotypes et d'aider à l'atteinte des objectifs de parité fixés par le groupe : à savoir 35% de femmes directrices d'hôtels en 2015 contre 27% actuellement. «Il s'agit de notre coeur business. C'est en faisant progresser les directrices d'hôtels qu'on fait bouger toute la chaîne», note Frédérique Poggi, en charge de la diversité chez Accor. En septembre dernier, le groupe a également lancé un nouveau concept de «mentoring» composé de 20 binômes sur la France, les «mentors» d'un côté (directrices d'opérations, de restauration, cadres dirigeants…) et les «mentorées» de l'autre (chefs de service, directrices d'hôtels…) pour favoriser l'accompagnement personnalisé. D'autres grandes entreprises s'activent sur le sujet de la mixité. Air France vise 25% de femmes dans son conseil d'administration en 2014 contre 20% actuellement. La SNCF a lancé le réseau «SNCF au féminin», qui compte déjà 2 500 membres. Google veut également jouer l'exemplarité.

Le moteur de recherche emploie 500 personnes à Paris, dont un tiers de femmes, ce qui représente un pourcentage assez significatif pour une entreprise très high-tech. «Google aspire à être la meilleure entreprise pour les femmes et les minorités», assure Katell Berthou, responsable réseau des femmes chez Google France. Petits déjeuners, speed-networking uniquement entre filles trois fois par an, et actions de formation sont organisés à dessein. Mais est-ce suffisant ?

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