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Alexandre Vesperini : Construisons le Grand Paris du tourisme

Le Conseiller de Paris Alexandre Vesperini plaide pour une vision et une stratégie touristique à l’échelle du Grand Paris. Son point de vue, dans cette tribune. 

A la manière de Clemenceau qui expliquait que la guerre est une chose bien trop importante pour être confiée aux militaires, en serons-nous réduits prochainement à dire que le tourisme est une chose bien trop importante pour être confiée aux élus locaux ? Au regard de l’évolution du secteur touristique en France et dans le Grand Paris en particulier, c’est pourtant la conclusion que nous risquons de prendre, si nous ne réorganisons pas l’accompagnement public de ces métiers.

Hôtels, restaurants, établissements de nuit, musées, stades et autres équipements de loisirs… tous ces acteurs représentent 7% du PIB national et près de 900 000 d’emplois directs. Véritable locomotive du secteur, Paris et sa région concentrent la majeure partie des activités dans l’Hexagone (47 millions d’arrivées touristiques, 395 000 emplois selon l’INSEE). Derrière ces chiffres en apparence très positifs se cache pourtant une réalité plus préoccupante. Si nos aéroports accueillent le plus grand nombre de touristes au monde, ces derniers sont malheureusement et bien souvent de passage, préférant consacrer plus de temps de loisirs à certaines métropoles plus pro-tourisme (Londres, Madrid…). Ainsi, Paris arrive 8ème au classement des dépenses par jour et par touriste, arrivant loin derrière New York et la capitale britannique. Les raisons de ce retard de la France sont principalement dues à la mutation des horaires d’une part (ouvertures dominicales et nocturnes) qui avance sûrement mais lentement, et à l’absence de coordination entre les acteurs de la filière d’autre part (difficultés à déployer les contrats de destination de plusieurs jours sur plusieurs sites différents).

Face à cette situation en trompe-l’œil, les pouvoirs publics sont en échec : premièrement, l’État, qui a relégué pendant si longtemps le tourisme qu’il est désormais rattaché au Quai d’Orsay, au sein d’un secrétariat d’État chargé également du commerce extérieur ; deuxièmement une maire de Paris qui s’oppose aux ouvertures dominicales, et recréé une guerre dépassée entre le tourisme de masse et le petit commerce ; troisièmement, une région qui prétend être compétente sur ce sujet mais oublie la connexion Roissy-Paris. Enfin, les autres organismes publics locaux ou nationaux comme Atout France multiplient les initiatives pour exploiter le formidable potentiel touristique de la région capitale, avec des marges de manoeuvre limitées.

Il faut donc réorganiser le soutien à la filière touristique à Paris Ile-de-France. Ce dernier doit être coordonné, décentralisé et assoupli. Tout d’abord, la désignation d’un chef de file de la politique touristique est en effet le premier des impératifs. À vouloir les confier aux collectivités locales autant qu’à l’État, ces enjeux sont aujourd’hui inscrits dans les compétences de tous mais dans les priorités de personne. Ce sujet pourrait ainsi revenir en priorité à la métropole du Grand Paris (MGP). La loi donne en effet à la MGP le périmètre pertinent (Paris et sa petite couronne ainsi que les deux sites de Versailles et Marne-la-Vallée s’ils le souhaitent) d’une part et les compétences (organisation des événements sportifs et culturels internationaux, aménagement des zones commerciales, artisanales et touristiques) d’autre part, pour assumer cette mission.

Ensuite, l’organisation décentralisée de la République, inscrite dans la constitution depuis 2004, doit devenir une réalité pour le tourisme. Dès lors que le Gouvernement ne consacre au tourisme qu’un secrétariat d’État (en Espagne et en Italie, il s’agit d’un ministère de plein exercice), pourquoi ne pas expérimenter un transfert de la part de l’État central, au profit d’une collectivité métropolitaine, sur le modèle des expérimentations testées avec certaines régions et départements (fonds structurels, habitat insalubre, RSA…) ? Accueillant plus de la moitié des touristes chaque année, la métropole du Grand Paris serait probablement mieux à même de faire avancer le développement touristique en France.

Enfin, cette désignation d’un chef de file plus proche du terrain doit privilégier la souplesse de gestion et éviter la sur-administration. Nouvel organisme, la MGP devrait a priori vivre avec son temps, c’est-à-dire en étant économe, rationnalisée et en lien avec le secteur privé. C’est du moins le vœu que nous pouvons former au moment de sa naissance… Dans ce cadre, le secteur touristique pourrait donc pour la première fois être accompagné par une collectivité managée comme le sont les principaux acteurs privés qui le composent.

À peine créée, la Métropole du Grand Paris concentrera l’attention de ses promoteurs d’une part, qui attendent qu’elle relie enfin la capitale et ses environs, et de ses opposants d’autre part, qui la jugent redondante ou inachevée. Comment alors mieux prouver son utilité autrement qu’en s’emparant d’un défi essentiel mais jusqu’ici relégué ?

Alexandre Vesperini

Conseiller de Paris (LR),

Délégué au Grand Paris au sein de la Fondation Concorde

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